Chi dell'altrui si veste, presto si spoglie (Celui qui prend l'habit d'autrui est bientôt dépouillé), c'est le titre amusant d'un opéra bouffe en trois actes de
Domenico Cimarosa, livret de Giuseppe Palomba. Cette œuvre fut créée au Teatro dei Fiorentini de Naples en 1783 (1). Son succès ne se démentit pas et l'opéra voyagea dans plusieurs capitales européènnes, il fut repris en 1787 à Eszterhàza sous la direction de
Joseph Haydn qui y effectua probablement quelques changements. A ce propos il serait passionnant de comparer le matériel d'exécution d'Eszterhàza avec le manuscrit original qui se trouve à la bibliothèque du conservatoire San Pietro a Majella de Naples.
Synopsis. Martuffo, serviteur de Don Putifare, croyant son maître mort dans un naufrage, se déguise et prend son apparence. Le vrai Don Putifare est fiancé à la baronne Stellidaura que sa servante, Ninetta, croit assassinée par des bandits de grand chemin. Ninetta qui est courtisée par Martuffo, se déguise en la défunte baronne et les deux domestiques jouent aux grands seigneurs. Mirandolina et son frère Gapamondo, deux aventuriers organisent des spectacles au village. Mirandolina est promise à Martuffo. Don Putifare et la Baronne Stellidaura, miraculeusement rescapés du naufrage et des voleurs, respectivement, reviennent dans leur fief, constatent la supercherie et pardonnent à leurs auteurs. Plusieurs mariages sont célébrés notamment ceux de Mirandolina avec Martuffo et celui de Ninetta avec Gianfabrizzio, le notaire de service (1).
Il ne peut être question d'écouter cette comédie la tête entre ses mains. Le scénario, sans queue ni tête, vise simplement à divertir et donne l'occasion à Cimarosa de composer un de ses opéras les plus légers donnant la priorité à des mélodies faciles et populaires. Des passages plus profonds et une très jolie orchestration avec des vents très actifs, donnent du piment à cet ouvrage qui toutefois n'égale peut-être pas
I due baroni di Rocca azzurra (1783) contemporain (2) ni surtout l'admirable
Olimpiade composée l'année suivante (3). Cet opéra a été enregistré en 1968 et un CD diffusé par le label Nuova Era, avec Ricardo Muti à la tête du Scarlatti Chorus and Orchestra et des solistes de renom. Cet enregistrement sur lequel je me suis basé, comporte seulement deux actes et présente malheureusement de nombreuses coupures ainsi que des airs d'insertion dont l'origine ne me semble pas claire.
Les sommets. Acte I
-Aria di Stellidaura. Cet air magnifique par son lyrisme et son élan remplace l'air
Un povero spiantato...prévu dans le livret. Un orchestre très actif comportant les bois au complet joue un rôle prédominant. On peut d'ailleurs se demander si cet air n'a pas été rajouté après coup lors d'une reprise tardives de l'opéra tant il présente des aspects typiques du dernier Cimarosa : présence des clarinettes, tournures mélodiques préromantiques.
-Aria di Gianfabrizzio (basso buffo),
Ve che pezzo, ve che tocca...Air désopilant du notaire s'exprimant dans un mélange de dialecte napolitain et de baragouin juridique.
-Au cours de l'amusant quartetto Putifare, Stellidaura, Ninetta, Martuffo,
Trista me la mia signora, quiproquos, bouffonneries se succèdent de façon vertigineuse.
-Un finale endiablé termine l'acte dans la confusion la plus totale. Il débute pourtant de façon très poétique,
Guarda, guarda la sposina...avec des flûtes merveilleuses. De jolies chansons populaires suivent. La dernière scène est particulièrement bouffonne,
Belando sta nel prato.... Les basses accompagnent avec des onomatopées Tu Tu Tu Tu..., les sopranos imitent les agneaux bêlants.
Acte II
Il est nettement plus lyrique et chantant que l'acte I.
-Il s'ouvre par un magnifique duetto Putifare et Stellidaura.
Voi siete un oggetto..., les deux protagonistes sont accompagnés par un hautbois très concertant. Ce duo, d'une extrême délicatesse, annonce les plus belles pages de Vincenzo Bellini. Il semble qu'il soit aussi une pièce rapportée car je n'ai pas trouvé le texte de cet air dans le livret..
-Aria de Ninetta,
Solitaria e meschinella. Air magnifique avec un bel accompagnement des cors. Il est suivi par un admirable récitatif accompagné, chanté par des violons remarquablement expressifs, au cours duquel Martuffo se lamente de n'avoir pas d'épouse.
-Aria de Ninetta,
Sono entrati gli ascoltanti. Aria bouffe basé sur des airs populaires. L'un d'eux
Ne ne, gue gue, frabotta, sta ccà Pulecenelle, est une authentique chanson populaire napolitaine.
-Le choeur
Vieni Luna est en fait une reprise d'un choeur présent dans la première scène de l'opéra.
-L'irrésistible scène finale
Contradanze cosi balleremo, est basée sue des airs populaires accompagnés par un fifre et des tambourins.
(1) Nick Rossi and Talmage Fauntleroy, Domenico Cimarosa, Greenwood Press, Westport, Connecticut, London, 1999.
(2)
https://haydn.aforumfree.com/t307-i-due-baroni-di-rocca-azzurra-melodie-cimarosienne(3)
https://haydn.aforumfree.com/t336-l-olimpiade-chef-d-oeuvre-de-cimarosa(4) Livret en italien :
http://books.google.fr/books?id=bzJ9H5PsLlUC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false