Messages : 664 Points : 814 Date d'inscription : 20/08/2007 Age : 78 Localisation : Nord
Sujet: Les Requiem Lun 3 Mai - 12:27
Dans les (rares) biographies de Michael Haydn, il est souvent dit qu'il a composé 3 Requiem :
ut mineur MH 155 de décembre 1771, intitulé "Missa pro Defuncto Archiepiscopo Sigismundo", composé pour les funérailles du prince-archevêque Sigismond von Schrattenbach, du 2 au 4 janvier 1772. C'est celui ci qui a fortement influencé Mozart dans son Requiem.
ut mineur MH 559 de 1792. Cette missa pro defunctis est en fait de Georg von Pasterwitz (1730-1803), moine compositeur de musique religieuse au monastère de Kremsmünster. Michael l'avait recopié -on ne sait pas la raison- et lui avait été attribué. Je l'ai écouté dans l'enregistrement Capriccio sous la direction de Werner Ehrhadt, et on sent bien que stylistiquement ce requiem n'est pas de Michael.
si bémol majeur MH 838 (fin 1805/1806) commandé (avec un Libera me) par l'impératrice Marie Thérèse. Michael, malade, ne vint à bout que de l'introit, kyrie et début du dies irae. Comme pour Mozart auquel il pensait, Michael a eu le pressentiment qu'il écrivait son Requiem pour ses propres funérailles, et comme pour Mozart il est resté inachevé ! Et effectivement, ce début de Requiem fut interprété à ses funérailles, complété par celui de 1771.
Il est possible d'écouter le Requiem en ut mineur MH 155 intégralement sur You Tube, cette messe de Requiem a été donnée au cours de la messe de funérailles de Otto de Habsbourg.
On sent l'immense influence qu'a eu cette composition sur celui de Mozart. C'est, je trouve, particuilièrement flagrant dans le Dies Irae.
Tout à fait d'accord. C'est vrai aussi dans l'Introït et le Kyrie avec une utilisation semblable de modes grégoriens. Dans les deux messes, l'offertoire se termine par une fugue sur les paroles Quam olim Abrahae et ces fugues se ressemblent étrangement. Notons que Joseph Haydn n'oubliera ni le Requiem de son frère Michaël ni celui de son ami Mozart quand il composera les Saisons et la fugue sur les paroles: Uns spriesset Ûberfluss und deiner Güte...
Le Requiem en ut mineur Missa pro Defuncto Archiepiscopo Sigismundo MH 155 est une des plus grandes oeuvres de Michael Haydn (1). Composé en 1771 à l'occasion du décès de l'archevêque de Salzbourg, Sigismond von Schrattenbach, il fut maintes fois joué en Autriche et en particulier sera exécuté le 2 juin 1809 à l'église de Gumpendorf à l'occasion des funérailles de Joseph Haydn, décédé deux jours auparavant. Le Requiem couronne une période de deux années de la vie de Michael Haydn qui vit naître une impressionnante quantité d'oeuvres religieuses. Il en fut de même pour Joseph Haydn qui dans les quatre années précédentes composa ses deux importantes messes en mi bémol HobXXII.4 et en ut HobXXII.5 et son magnifique Stabat Mater HobXXbis. Mozart sera grandement influencé par le chef-d'oeuvre de Michael Haydn lors de la composition de son Requiem K 626 de 1791, les deux oeuvres utilisent en effet le même texte et contiennent des passages similaires, ressemblances qu'il ne faut pas exagérer, Mozart et Haydn imprimant chacun puissamment leur style personnel.
Requiem aeternum et Kyrie eleison adagio 4/4 en ut mineur sont fusionnés dans un seul morceau. L'introït débute par des imitations par les quatre voix du choeur sur les mots Requiem aeternum. Un nouveau thème confié au choeur utilise le plain chant (premier mode Grégorien (1) sur les mots Te decet hymnus). Le thème initial Requiem aeternum est maintenant confié au quatuor vocal avec un sentiment très profond. Le Kyrie eleison utilise le thème "Grégorien" et le quatuor vocal s'empare de la supplication Christe eleison dans une ambiance adoucie. La fin du morceau très dramatique est scandée par les trompettes avec une tierce picarde conclusive.
Dies Irae Andante moderato en ut mineur 3/4. Dies Irae, Tuba mirum, Tremendae, Recordare, Confutatis maledictis Lacrysoma sont d'un seul tenant alors que dans le Requiem de Mozart ces morceaux sont indépendants. Le début du Dies Irae est scandé aux trombones et trompettes par un rythme très caractéristique qui parcourra toute la séquence Dies Irae et que l'on retrouvera dans nombre d'oeuvres de Joseph Haydn. Solo de la soprano très véhément sur Mors stupebit suivi d'un solo d'alto sur Judex ergo. Le ténor intervient ensuite sur Juste judex et est relayé enfin par la basse. L'épisode Confutatis maledictis, très dramatique est clamé par le choeur puis le quatuors de solistes. On note la partie de trompettes très active dans la séquence Lacrymosa. De magnifiques vocalises sur amen terminent le Dies Irae avec une tierce picarde aux trompettes.
Offertoire. Le Domine Jesu Christus en sol mineur est remarquable par des harmonies chromatiques impressionnantes, on aboutit à un passage choral très agité qui, avec ses trompettes évoluant dans l'aigu, évoque fortement le style de Jean Sébastien Bach, puis à un solo de sopreno en si bémol majeur plus calme. L'épisode Quam olim Abrahae est une fugue en sol mineur chantée par le choeur doublé par les trombones. On remarque la ressemblance entre cette fugue et celle située au même endroit et sur les mêmes paroles du Requiem K 626 de Mozart. L'Hostias consiste en un solo d'alto très expressif accompagné par un thème magnifique aux violons. Retour de la fugue et Fin de la séquence par une tierce picarde aux trompettes.
Sanctus. Andante. Le Sanctus débute en ut majeur mais module très vite en fa mineur. Le caractère méditatif de ce morceau est accentué encore dans le passage Hosannah in exelsis en mi bémol majeur dont le tempo très lent, presque funèbre, surprend mais convient parfaitement aux circonstances. Dans le Benedictus, allegretto en mi bémol majeur, la basse reprend la mélodie grégorienne du début du Requiem, le ténor, l'alto, la soprano et enfin le choeur enchainent. L'accompagnement aux violons est particulièrement riche. Retour de l'Hosannah plus poignant que jamais avec tierce picarde aux trompettes à la fin.
Agnus Dei. Adagio en ut mineur. C'est la soprano qui entonne l'Agnus et le choeur qui conclut la première supplication à l'Agneau de Dieu. La seconde est chantée par la basse et les trompettes répondent de façon très dramatique. Le ténor intervient ensuite et le choeur répond de manière très intense. On remarque une montée chromatique de la soprano très émouvante.
Cum Sanctis tuis in aeternum Allegretto ut mineur. Grande fugue sur un thème baroque comportant un intervalle de septième diminuée, lieu commun fréquemment utilisé dans la musique baroque où se croisent les musiques du Messie de Haendel, la fugue qui conclut le quatuor en fa mineur opus 20 n°5 de Joseph Haydn, le Laudate pueri des vêpres d'un Confesseur K 339 de Mozart. On notera les parties importantes de trombones qui doublent les voix d'alto, ténor et basse et la fin magnifique de la fugue. La messe des Morts se termine avec un retour du Requiem aeternum abrégé et de la grande fugue aboutissant à une tierce picarde aux trompettes.
(1) Marc Vignal, Michael Haydn, Horizons, 2008, pp 54-57.
Un concert exceptionnel par l'intérêt de la programmation et la qualité des artistes qui a été donné le 11 juin dernier à la Basilique de Saint Denis dans le cadre du festival prestigieux de Saint Denis qui vient de s'achever. J'espère qu'il restera une trace de ce concert.
Joachim
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Sujet: Re: Les Requiem Mer 20 Mai - 20:05
Comme expliqué ci-dessus, le Requiem en si bémol majeur a été laissé inachevé par Michael Haydn.
Or, en 1839, un prêtre, Paul Gunther Kronecker a terminé le fragment de Requiem n° 3 en si bémol majeur que Michael Haydn avait commencé de composer en 1806 pour les funérailles de l'impératrice Marie Thérèse et laissé inachevé par son décès. Kronecker a effectué les travaux dans l'esprit et le style de M. Haydn. Il a été clairement influencé par le Requiem en ut mineur que M.Haydn a composé en 1771 pour l'archevêque Sigismund Schrattenbach.
Il existe ce CD :
Un mot sur Kronecker :
Paul Gunther Kronecker est un prêtre et compositeur autrichien, né à Fischlham (Haute-Autriche) le 27 janvier 1803, et mort à Kremsmünster le 14 août 1847.
Il était le fils d'un fossoyeur; il a reçu ses premières leçons de musique de son professeur J. Thier. En 1817, il est parti au Stiftsgymnasium de Melk, puis à Kremsmünster où l'organiste Wawra lui a enseigné la théorie de la musique et où il a rencontré Schubert. En 1825, il est allé à Vienne étudier le droit. En 1826, il entra au monastère bénédictin de Kremsmünster. En 1827 il étudie la théologie à Linz. En 1830 a lieu sa Profession de foi et en 1831 son ordination. De 1831 à 1835, il était organiste à Eberstallzell, et de 1835 à 1840 à Thalheim bei Wels. En 1840, il était trésorier de Kremsmünster. En 1841 il est maître de chapelle, et a composé de la musique pour son monastère.
Mais on ne dit pas pour quelle raison il a complété ce Requiem de Michael...
Merci Joachim pour ces informations concernant le Requiem en si bémol majeur de Michael Haydn.
A l'écoute des seules parties authentiques, on ne peut que déplorer que cette oeuvre soit restée inachevée. Marc Vignal fait remarquer que les parties composées par Haydn n'étaient en rien des esquisses mais des morceaux de musique vocale et instrumentale entièrement harmonisés et orchestrés où il ne manque pas une seule note (1).
La sonorité de cette messe des Morts est fascinante. La douce tonalité de si bémol majeur y est pour quelque chose mais aussi l'instrumentation de Haydn qui donne aux trombones une place de choix. ces instruments sont utilisés en douceur ce qui donne une sonorité à la fois onctueuse et majestueuse.
Au plan du style, cette oeuvre se situe dans la suite de la messe de Requiem de Mozart avec lequel il y a un air de famille certain mais aussi elle anticipe les oeuvres à venir de Franz Schubert, un admirateur sincère de Michael. Un sentiment de confiance et de sérénité règne dans l'oeuvre dans son ensemble.
A noter la superbe fugue du Kyrie Eleison qui se situe au même endroit que chez Mozart dans sa messe de Requiem en ré mineur et qui se termine par une péroraison grandiose. Le début du Dies Irae reste dans ce style très polyphonique. Le manuscrit s'arrête brusquement sur les paroles Unde mundus judicetur....
La suite n'étant plus de Michael Haydn ne nous intéresse pas….On peut toutefois remercier Kronecker d'avoir écrit une musique assez proche du style de la fin du 18ème siècle en Allemagne du sud ou en Autriche. La séquence Quam olim Abrahae est une fugue comme chez Mozart dans son Requiem. Le sujet de la fugue ressemble beaucoup à celui utilisé par Mozart mais transposé dans le mode majeur, il ressemble aussi beaucoup à une fugue présente dans les Saisons de Joseph Haydn. On peut aussi remercier Hornecker, à l'instar de Süssmaier dans le cas du Requiem de Mozart, d'avoir repris pour sa conclusion le début de la partie rédigée par Michael Haydn et notamment le belle fugue reprise sur les paroles Cum Sanctis tuis.
(1) Marc Vignal, Michel Haydn, bleu nuit éditeur 2009.
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Les Requiem
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