La
sonate n° 53 en mi mineur (HobXVI.34) forme avec la 52ème sonate en sol majeur (HobXVI.39) un diptyque. Elle est presque son image dans un miroir. Sa tonalité, mi mineur, est le
relatif mineur de sol majeur; elle commence là où se termine la précédente avec un Presto qui est, comme le Prestissimo du Finale de la 52ème, une
structure sonate (1); enfin elle s'achève, comme la précédente avait commencé, par un
thème varié. Il aurait été logique que les deux sonates soient publiées ensemble. Quand la série précédente, comportant en cinquième position la 52ème sonate en sol majeur, fut publiée en 1780, la mi mineur n'était peut-être pas encore composée; elle le fut probablement plus tard, avant 1784, date de sa parution à Londres avec deux autres oeuvres composées auparavant: une sonate en la bémol (HobXVI.43) et une sonate en ré (HobXVI.33).
Le premier mouvement,
Presto, est une
structure sonate (1) strictement
monothématique. La technique pianistique est très proche de celle du
Prestissimo de la sonate précédente avec un thème en notes piquées, initié aux basses de l'instrument et partagé enter les deux mains du pianiste. Arrivé au relatif majeur, à la place du second thème, c'est le premier, notablement modifié, qui réapparait, habillé cette fois de superbes contrepoints. Le pathétique
développement est construit entièrement autour du thème unique qui, cette fois, est attaqué dans l'aigu et continué à la main gauche; ce magnifique passage très intense aboutit à un point d'orgue. La
réexposition est rendue plus expressive du fait de la transposition du "second sujet" dans le ton relatif mineur et tout se termine par une superbe
coda où on entend le thème une dernière fois pianissimo dans l'aigu. Il existe, à mon avis, des analogies entre ce morceau et la premier mouvement de la 14ème sonate en ut mineur KV 457 de Mozart datant de 1784.
L'
Adagio en sol majeur consiste en une
cantilène jouée exclusivement par la main droite et possédant un caractère vocal très prononcé. Pendant toute la durée du morceau, la main gauche se fait très discrète et se borne à ponctuer le discours par quelques accords comme si Haydn avait voulu faire ressortir au maximum la beauté de la mélodie. Ce magnifique mouvement nous rapelle qu'à cette époque Haydn était absorbé par la composition de ses plus beaux opéras: La Fedelta Premiata (1781), Orlando Paladino (1782) et Armida (1784).
C'est avec le thème initial
inoubliable (en mi mineur) du finale
Vivace molto que j'avais pris contact pour la première fois avec les sonates de Haydn. Comme ce sera très souvent le cas dans nombre d'oeuvres futures, Haydn alterne les variations majeures et mineures. Dans le cas de ce finale, il ne fait subir au thème que de légères modifications comme s'il voulait absolument en préserver la pureté et l'éclat miraculeux.
Cette sonate est une
oeuvre d'art admirable, un bijou serti de pierres précieuses aux multiples facettes.
(1)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Structure_sonate