On possède de la sonate n° 34 en ré majeur (HobXVI.33) deux copies datées de 1778, ce qui montre que sa composition est antérieure à cette date (1). Avec la sonate n° 34, nous retrouvons les caractéristiques que nous avons signalées pour la sonate n° 35 en la bémol: Elégance, charme mélodique, absence de contrepoint et prédominance de la mélodie, en fait les attributs de la musique galante, passage obligé , comme cela a été écrit, dans l'accès au style classique (1).
Le premier mouvement, Allegro à 2/4, est brillant et joyeux et aucun nuage ne vient le troubler. Le développement est relativement court et sans travail thématique intense. Chose rare chez Haydn, la réexposition est semblable à l'exposition. Ce morceau est toutefois très agréable et on en redemande.
Changement complet d'ambiance avec le magnifique Adagio en ré mineur. Ce dernier est en deux parties, la première encadrée par des barres de reprises. En somme la coupe de cet adagio est très semblable à celle de mouvements lents des sonates n° 39 en ré majeur (XVI.24), n° 46 en mi majeur (XVI.36) et n° 50 en ré majeur (XVI.37), peut-être contemporaines ou futures. Quelques mesures après le début de l'Adagio, une admirable mélodie jouée par la main droite s'élève au dessus d'un accompagnement très expressif de triolets de doubles croches. La formule conclusive très émouvante de cette mélodie est typiquement "haydnienne"; on la retrouve dans l'Adagio de la symphonie n° 102 en si bémol majeur (1794) et dans le sublime récitatif et aria d'Euridice "Dov'è, dov'è l'amato bene..."dans le deuxième acte d'Orfeo ed Euridice (1791).
Le finale, enchainé à l'Adagio, retrouve la sérénité. C'est un Tempo di minuetto qui offre une fois de plus un heureux compromis de rondo et de thème varié. La structure ABA'B'A" est celle d'un Rondo mais refrain (A) et couplets (B) peuvent être lus comme des variations doubles (A = variations majeures; B = variations mineures). En tout état de cause, le thème du menuet (car c'est également un menuet) est très dansant et donne lieu à d'intéressantes variations, la dernière en particulier, répète d'abord le thème puis le varie brillamment par des arpèges d'agiles doubles croches qui évoquent la harpe (d'Orfeo bien sûr).
(1) Marc Vignal, Joseph Haydn, Fayard, 1988.