Les derniers trois trios pour piano, violon et violoncelle qui nous restent à étudier sont des oeuvres isolées. Le trio n°31 en sol majeur date probablement de 1793 et aurait été composé à Vienne juste avant le second départ pour Londres, le trio n° 44 en mi bémol mineur date de 1794-5, il a été composé à Londres pour Thérèse Jansen-Bartolozzi, enfin le trio n° 45 en mi bémol majeur fut composé à Vienne en 1796, c'est le dernier trio composé par Joseph Haydn.
Le Trio n° 31 en sol majeur (HobXV.32) était considéré jusqu'en 1957 comme la seule sonate pour piano et violon de Haydn. Les circonstances qui ont permis de découvrir la partie de violoncelle sont détaillées dans l'ouvrage de Marc Vignal (1). Il comporte deux mouvements.
Le premier mouvement Andante a une forme très originale, intermédiaire entre la forme lied (ABA': un intermède B précédé par une exposition de sonate A et suivi par une reexposition plus ou moins variée A') et le thème varié. La première partie débute par un thème d'un grand charme mélodique (il présente des ressemblances avec le second mouvement de la sonate pour piano et violon en sol majeur également KV 301 de Mozart), exposé par le pianoforte et accompagné par les pizzicati des cordes. Le thème est répété par le violon puis on assiste à l'interieur de cette partie à de subtiles variations sur le thème. Le magnifique intermède qui suit peut être considéré comme une variation mineure très dramatique. Retour du thème au violon richement varié, orné et brillamment accompagné par les triolets de doubles croches du clavier. La coda répète plusieurs fois doucement puis fortissimo le début du thème. On peut donc dire qu'il s'agit d'un thème varié alla Haydn avec des variations à l'interieur de chaque variation!
Le second mouvement Allegro est une vaste structure sonate virtuose et brillante présentant au moins quatre thèmes. Le troisième thème est remarquable par l'usage du procédé de l'écho. Le violon répète le début du motif joué par le piano à un temps d'intervalle résultant en un effet sonore très intéressant mais d'exécution vétilleuse. Le développement débute d'abord avec un motif très discret de l'exposition puis utilise longuement le troisième thème avec son écho admirablement mis en valeur par les modulations les plus expressives, passage peut-être le plus impressionnant de l'oeuvre. La reprise, d'abord similaire à l'exposition, est ensuite légèrement variée et suivie par une belle coda. Cette dernière reprend le motif discret et rêveur qui commencait le développement pour s'attarder enfin à l'inépuisable troisième thème.
Bref un trio très original qu'il ne fallait surtout pas négliger.
(1) Marc Vignal, Joseph Haydn, Fayard, 1988, pp 1249-50.