A propos du
Trio n° 41 en mi bémol mineur (HobXV.31), on peut consulter l'anecdote suivante:
https://haydn.aforumfree.com/haydn-une-longue-vie-mouvementee-f5/le-reve-de-jacob-t200.htmCe trio pour piano, violon et violoncelle, composé par
Joseph Haydn en 1794-5 fut dédié à la pianiste
Thérèse Jansen-Bartolozzi. La tonalité improbable de
mi bémol mineur est déjà un manifeste d'originalité de la part de Haydn. Les six bémols à la clé du premier mouvement interdisent l'usage des cordes à vide pour sept sur les huit cordes du violon et du violoncelle.
Le premier mouvement
Andante est un
double thème varié comportant le thème en mi bémol mineur encadré par de doubles barres de reprises, une variation en majeur, une variation en mineur, une variation en majeur et une dernière variation mineure. Les deux émouvantes "variations" majeures pourraient aussi bien être qualifiées d'intermèdes car toutes deux s'éloignent beaucoup du thème initial. Le thème ici est particulièrement pathétique et la fin de sa deuxième partie est remarquable par son expression intense conférée par des
harmonies chromatiques vraiment poignantes. Les deux superbes variations mineures exploitent toutes les potentialités expressives du thème. On a là un des
thèmes variés le plus dramatiques de Haydn.Le second mouvement "
Jacobs Dream"
Allegro en mi bémol majeur m'a posé un problème. J'ai trouvé ce morceau
atypique et me suis demandé ce que son auteur avait voulu dire et où voulait-il nous emmener? Comment un musicien écrivant des oeuvres toujours aussi
solidement architecturées avait-il pu composer une pièce apparemment dépourvue de fil directeur, mélangeant allègrement, rythmes, motifs, avec un violon partant dans tous les sens? La gaité de ce mouvement m'a aussi semblé de surface et même factice, cachant une
sourde angoisse sous-jacente. Cette angoisse affleure dans certaines parties du développement (mais est-ce vraiment un développement?). Lors de la réexposition, violon et piano font étalage de virtuosité avec des traits compliqués qui débouchent sur le vide, du moins est-ce ainsi que je le sens. Y-a-t-il eu chez Haydn un désir de provocation vis à vis d'un violoniste inexpérimenté comme semble le relater Dies? Cette oeuvre, comme d'autres des années 1790 (nombreux passages d'Orfeo ed Euridice, sonate n° 61 en ré, interlude en la mineur des 7 Dernières Paroles du Christ, trio n° 37 en ré mineur...), est-elle le témoignage d'une
anxiété passagère ou d'un désarroi de Haydn? Mon imagination me joue peut-être des tours c'est pourquoi je serais heureux d'avoir d'autres points de vue.