Messages : 25 Points : 31 Date d'inscription : 27/09/2018 Age : 84 Localisation : Drôme
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Ven 5 Avr - 12:23
Un commentaire un peu hors-sujet.
Chostakovitch semble plutôt oublié qu'apprécié en Russie aujourd'hui. Ceci d'après ce que dit une Russe qui m'est proche. Peut-être que le fait qu'il ait vécu à l'époque soviétique est mal ressenti. Ceci bien que ses relations avec le régime aient été ambiguës. Mais plus simplement parce qu'après les années 90 ce lourd passé a disparu de la pensée de l'immense majorité des Russes.
Il en serait de même pour Prokofiev.
Bien sûr vous devez savoir que ce dernier a vécu quelques temps dans l'Ain pas très loin d'Ambronay. Ceci bien avant le festival d'aujourd'hui dont il est question dans un autre message.
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Lun 23 Sep - 7:09
Blumberg a écrit:
Un commentaire un peu hors-sujet.
Chostakovitch semble plutôt oublié qu'apprécié en Russie aujourd'hui. Ceci d'après ce que dit une Russe qui m'est proche. Peut-être que le fait qu'il ait vécu à l'époque soviétique est mal ressenti. Ceci bien que ses relations avec le régime aient été ambiguës. Mais plus simplement parce qu'après les années 90 ce lourd passé a disparu de la pensée de l'immense majorité des Russes.
Il en serait de même pour Prokofiev.
Bien sûr vous devez savoir que ce dernier a vécu quelques temps dans l'Ain pas très loin d'Ambronay. Ceci bien avant le festival d'aujourd'hui dont il est question dans un autre message.
Merci pour ces considérations très intéressantes. Je ne savais pas que Prokofiev avait vécu à Ambronay. J'y serai en fin de semaine à l'occasion du festival 2019. Peut-être trouverai-je des traces de son passage?
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Jeu 24 Oct - 11:23
Symphonie n°12 en re mineur, L'Année 1917, opus 112.
Après l'année 1905, voici l'année 1917, deuxième volet d'un diptyque destiné à célébrer les deux révolutions russes. La 11ème symphonie décrivait les évènements qui aboutissaient à la fin d'un monde à l'issue d'une révolution avortée. C'est à une Aube Nouvelle que nous convie la 12ème symphonie. Si on s'attend à une apothéose grandiose faisant suite au paysage apocalyptique dépeint dans la fin de la 11ème symphonie, on risque d'être cruellement déçu: la 12ème symphonie est une des pages les plus sages et classiques de Dimitri Chostakovitch (DSCH) et une des plus chantantes. Les thèmes, provenant de chants révolutionnaires, se gravent instantanément dans la mémoire. Elle a été créée par Evgueni Mravinski en 1961.
Premier mouvement: Petrograd Révolutionnaire. Dans une introduction lente apparait le premier thème d'une structure sonate classique. Ce thème très beau est repris dans un mouvement rapide par le basson, la clarinette, il devient de plus en plus énergique et dynamique pour aboutir à un brillant tutti. Le second thème en majeur est chantant et chaleureux, très développé, il circule dans tout l'orchestre et acquiert une stature de plus en plus solennelle (2). Le développement assez touffu et polyphonique est basé sur le premier thème ainsi que sur une idée nouvelle. Dans la rentrée, assez écourtée, le premier thème prend un caractère triomphal et le second thème se fait plus discret. Après un retour de l'introduction lente, une belle coda fait dialoguer les vents avec la caisse claire.
Deuxième mouvement: Razliv. Razliv est une bourgade abritant le quartier général de Lénine. Ce mouvement, centré sur la beauté mélodique, est en forme d'arche. Il débute avec un thème très mélodieux au cor avec un contrechant caractéristique, ce thème passera à la flûte et le contrechant à la clarinette. Ces chants seront entrecoupés par de courts épisodes, sortes de chorals aux cordes puis aux cuivres. L'intermède central consiste en un chant du hautbois, du basson et terminé par les clarinettes. Le retour du premier thème plus expressif que jamais, chanté par un trombone avec le contrechant aux clarinettes nous vaut un magnifique épisode. A la fin du morceau le thème principal passe aux basses tandis que retentit un roulement de timbales.
Troisième mouvement: Aurora. C'est le nom du sous-marin qui tira quelques coups de canon, facilitant la prise de pouvoir de Lenine et Trotsky. Le mouvement débute par quelques discrets coups de timbales et quelques accords pizzicati des cordes. La sonorité de ce morceau prend de l'ampleur, les timbales deviennent plus puissantes et sont relayées par les cymbales. Ce mouvement est quelque peu parodique, ces coups de timbales ne font pas sérieux. En fait un seul coup de canon (à blanc) a été tiré, il suffit à une poignée de partisans de se rendre maitres du Palais d'Hiver (3).
Quatrième mouvement: l'Aube de l'Humanité. C'est un Rondo. Le thème du refrain au caractère d'hymne est retentit aux quatre cors. Le premier couplet débute avec un nouveau thème assez pastoral à la métrique irrégulière, il est joué par les flûtes, clarinettes, violons, hautbois tandis que s'intercale le premier thème de la symphonie. Retour du refrain, l'hymne est clamé cette fois par tout l'orchestre. Deuxième couplet avec le retour du thème pastoral combiné cette fois avec le thème initial de la symphonie. Dans la coda c'est le second thème du premier mouvement qui prend le dessus et prend un caractère solennel et presque religieux.
Cette symphonie fut très critiquée en Occident, on l'a souvent considérée comme un acte de complaisance vis à vis du pouvoir politique et elle figure souvent, en compagnie de la 2ème et la 3ème, parmi les symphonies "ratées" de DSCH. Qu'on se le dise, il n'y a pas de symphonie ratée, cette 12ème symphonie tient sa place dans le corpus symphonique. Au delà du contexte révolutionnaire, elle est musicalement splendide. A mon humble avis, DSCH a voulu que sa symphonie puisse être jugée par la postérité selon ses mérites propres et non pas en fonction d'opinions politiques.
(1) Le Monde de la Musique, La Vague Chostakovitch, n°312, 2006. (2) Les deux thèmes de ce mouvement sont issus de chants révolutionnaires russes et polonais. (3) http://fr.wikipedia.org/wiki/Révolution_russe
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Jeu 2 Jan - 11:31
13ème symphonie en si bémol mineur Babi Yar, opus 113.
Composée en 1961, elle fut crée par Kiril Kondrashin à Moscou en 1962. Elle est écrite pour voix de basse solo, choeur d'hommes et orchestre. Mis à part quelques préludes ou interludes instrumentaux, l'oeuvre est entièrement chantée. Le choeur toujours à l'unisson et le soliste, alternent, dans un souci constant de clarté. Aucune virtuosité, aucune vocalise qui puisse altérer l'intelligibilité du texte.
Babi Yar, titre du premier mouvement, est le nom du lieu où fut découvert un charnier de juifs soviétiques massacrés pendant la guerre. Dans une angoissante évocation de Babi Yar, le texte de Yevgeny Yevtushenko, stigmatise l'antisémitisme et inspire à DSCH une page exceptionnelle. La violence et l'âpreté de ce mouvement rappelle l'ambiance des 4ème et 8ème symphonies. Le prodigieux thème funèbre qui domine presque tout le morceau est joué par les trompettes avec un accompagnement des cuivres graves et du glas. Le chant magnifique du soliste et du choeur est interrompu au moment le plus angoissant du texte par un interlude d'une terrible violence, sorte de développement sur le premier thème impliquant une puissante percussion (le tam-tam en particulier).
Le deuxième mouvement, Humour, allegretto, est le type même du scherzo alla DSCH avec son humour corrosif et grinçant, le texte fait la louange de l'humour dans la vie quotidienne qui permet à l'homme libre de défier l'autorité.
Le troisième mouvement, Au Magasin, Adagio, est un hommage aux femmes soviétiques dont la vie quotidienne est un acte d'héroïsme et qui après une dure journée de travail doivent subir, dans un froid glacial, les terribles files d'attente dans les magasins. Ce morceau débute aux contrebasses par un thème sinueux, sombre mais empreint de résignation. La fin des phrases musicales est curieusement marquée par un rythme caractéristique du bloc de bois. Le thème est repris par le choeur, la clarinette, la voix. Magnifique reprise du thème par les violons en sourdine, accompagnés d'accords de la harpe et du célesta. Un impressionnant crescendo aboutit à un fortissimo de tout l'orchestre et du choeur. Conclusion apaisée et intervention finale du bloc de bois.
Quatrième mouvement, Peurs, Adagio. Sur un sinistre fond de timbales, un thème torturé retentit au tuba puis est repris par le choeur et le soliste. Le texte évoque la peur de parler et la hantise de la dénonciation anonyme voire même par des membres de la famille. Ce texte inspire à DSCH une musique impressionnante de violence contenue. Dans un interlude d'une noirceur effrayante, les percussions, timbales, piano et cloches ont la part belle.
Cinquième mouvement, Carrières, Allegretto. Il débute par un prélude instrumental aux flûtes, puis aux autres bois qui va jouer un rôle majeur tout au long du morceau et peut être considéré comme le refrain d'un Rondo. Comme dans les finales des 8èmes et 10èmes symphonies, le ton est bien plus détendu que ce qui précède. Le texte se moque des carriéristes et prend pour modèle les grands hommes du passé (par exemple Galilée) qui défièrent les pouvoirs en place pour défendre leurs idées, parfois au péril de leur vie. Après un premier intermède entièrement chanté, le refrain du Rondo réapparait en pizzicati aux cordes. Dans le second couplet on retrouve la veine parodique et sarcastique de DSCH mais la fin du couplet a un caractère plus solennel avec un passage de la clarinette basse très caractéristique. Le morceau se termine avec un retour du refrain aux cordes en sourdine, sublime de simplicité. Le célesta distille à la fin ses petites notes de pur cristal. Magnifique et émouvant! On pense aux dernières mesures du Chant de la Terre de Gustave Mahler.
J'espère avoir exprimé l'admiration sans bornes que j'éprouve pour cette symphonie. Dans mes préférences, elle figure juste après la 4ème et la 8ème et devant la 10ème.
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Ven 17 Avr - 12:18
Symphonie n°14 en sol mineur, opus 135
Elle fut crée par Rudolf Barshai à Moscou en 1969. Ecrite pour voix de basse et de soprano avec un petit orchestre à cordes et des percussions, on peut la considérer comme une cantate. DSCH a mis en musique 11 textes de Federico Garcia Lorca, Guillaume Apollinaire, Wilhelm Kuchelbecker et Rainer Maria Rilke. Presque tous les textes ont pour sujet la Mort et une source d'inspiration pour DSCH fut les Danses et Chants de la Mort de Moussorsky que DSCH avait orchestré peu de temps auparavant. Au plan musical, on constate que la musique est de loin la plus avancée dans son oeuvre symphonique. On note même dans certains passages, l'apparition de séries de douze sons sans que cela soit systématique.
De Profundis, Federico Garcia Lorca. C'est de la mort de l'amour dont il s'agit ici (1). Le prélude confié aux cordes débute avec une série de douze sons. Le soliste s'exprime dans un langage plus direct mais remarquablement dépouillé.
Malaguena, Federico Garcia Lorca. Le Texte, une sorte de danse macabre, est chanté par la soprano. On remarque l'accompagnement agressif des cordes dans un style proche de Bartok (divertimento). A la fin les castagnettes apportent une note de couleur locale.
La Loreley, Guillaume Apollinaire. A mon humble avis, le sommet de l'oeuvre. Texte fantastique chanté par la soprano et la basse accompagnées par les cordes et les percussions (xylophone et bloc de bois). La musique est d'abord violemment agressive et dissonante d'une tension presqu'insoutenable, on y distingue plusieurs séries de douze sons. A la fin, il y a un passage très beau et poétique associant la voix de soprano, les cordes avec sourdines, le célesta, des cloches au lointain lorsque la belle Lorelei monte sur un rocher pour se mirer dans le Rhin et voir son amant puis se jette dans le fleuve...Magnifique transition au violoncelle vers le poème suivant.
Le Suicidé, Apollinaire. Autre chef-d'oeuvre. "Trois grands lys sur ma tombe sans croix..." Trois couplets. Le chant du soprano est acompagné par les cordes et le célesta. La musique se fait un temps moins agressive, plus mélodieuse. Un passage associant le xylophone, les cordes devient extrêmement violent , quasi hystérique (clusters) sur les paroles "l'autre (lys) sort de ma bouche..."(1). Retour sur le premier couplet dans un climat désespéré.
Les Attentives I et II, Apollinaire. "Celui qui doit mourir ce soir dans les tranchées...", ainsi s'exprime la Mort par la voix de la soprano. S'agit-il du soldat ou de l'Amour? (1). Le chant est précédé par un prélude caractéristique du xylophone et des timbales. On retrouve la même veine sarcastique et grimaçante dans les deux morceaux.
A la Santé, Apollinaire. Nouveau terrible chef-d'oeuvre. "Avant d'entrer dans ma cellule..."Ainsi s'exclame le Prisonnier sur un magnifique accompagnement des cordes en sourdine. Suit un long interlude des cordes jouant pizzicatto quadruple pianissimo, ponctué par le bloc de bois. Le chant qui suit exprime la révolte mais la fin sur les paroles"Belle clarté, chère Raison" devient plus calme, presque résignée.
O Delvig, Delvig, Wilhelm Kuchelbecker. Une ambiance plus sereine, moins déserpérée, règne dans cet hommage au poète disparu. La musique se fait plus mélodieuse dans ce magnifique et émouvant chant de la basse.
La Mort du Poète, Rainer Maria Rilke. Il débute avec un admirable chant du premier violon. La belle mélodie de la soprano est accompagnée par les cordes en sourdine et à la fin par les cloches et le célesta.
Conclusion, Rainer Maria Rilke. "Toute puissante est la Mort..." La basse et la soprano sont accompagnés par les cordes et le bloc de bois. Fin fortissimo. La symphonie se termine comme elle avait commencé dans un climat de desespoir.
Cette symphonie est me semble-t-il la plus dépouillée, voire la plus austère de DSCH, elle possède un caractère de musique de chambre qui la rend unique. DSCH va à l'essentiel, aucune fioriture, aucun ornement pour géner sa marche vers une forme de perfection.
Elle figure évidemment dans le peloton de tête mais dans quel classement? La comparaison avec les autres symphonies me semble difficile même si par certains points elle se rattache à la précédente.
(1) LES DERNIÈRES ŒUVRES DE DIMITRI CHOSTAKOVITCH Une esthétique musicale de la mort (1969-1975) Grégoire Tosser Préface de Michel Guiomar, Univers musical, l'Harmattan
Sujet: Re: Dmitri CHOSTAKOVITCH (1906-1975) Mar 2 Juin - 22:48
Symphonie n°15 en la majeur, opus 141
Elle sera crée le 29 septembre 1969 à Moscou par Maxime Chostakovitch, fils du compositeur. Dimitri Chostakovitch (que nous appelons DSCH) revient ici à la symphonie purement instrumentale de forme classique puisqu'elle compte les quatre mouvements habituels. Mais le contenu est loin d'être classique, il est le produit d'un créateur au sommet de son art. Elle est écrite pour les instruments suivants: flûte piccolo, deux grandes flûtes, 2 clarinettes en si bémol, 2 hautbois, 2 bassons, 4 cors, 2 trompettes, 3 trombones, un tuba en si bémol, 4 timbales, une grosse caisse, une caisse claire, 2 tom-tom (caisses intermédiaires utilisées dans le Jazz), cymbales, tam-tam, triangle, castagnettes, bloc de bois, fouet, xylophone, glockenspiel, vibraphone, célesta et cordes (1). Comme on le voit, il s'agit d'un relativement petit orchestre. Les cordes, les bois et les cuivres sont ceux des orchestres romantiques du 19ème siècle, par contre les percussions sont les plus importantes jamais utilisés par DSCH dans une symphonie.
Premier mouvement Allegretto. Ce morceau possède une structure difficile à appréhender tant le mouvement y est continu et les thèmes enchevêtrés. On peut toutefois le considérer comme une structure sonate à deux thèmes. Le premier thème plutôt narquois, joue un rôle prépondérant. Après deux tintements du glockenspiel, il débute aux flûtes mais ensuite est véhiculé par presque tous les instruments. Il est relayé par un second thème, cette fois vraiment parodique qui est une citation textuelle d'un thème célèbre de Guillaume Tell de Rossini, beaucoup plus explicite ici que dans le finale de la 6ème symphonie. Les deux thèmes sont utilisés tout au long du développement qui débute avec le premier thème au xylophone accompagné par la caisse claire. Ce développement est très polyphonique, on y trouve en particulier un étrange fugato des cordes dans lequel les voix entrent avec chaque fois un rythme différent, bel exemple de polyrythmie. Lors de la réexposition, l'inépuisable premier thème est d'abord entendu au célesta, il passe ensuite au trombone, premier violon, xylophone, prend de l'ampleur et devient vraiment triomphal lorsqu'il est clamé par les trois trombones. Dans la coda, le passage polyrythmique revient mais cette fois aux vents. Ce mouvement est ciselé comme une pièce rare d'orfèvrerie. DSCH a confié qu'il a voulu y évoquer l'esprit d'enfance fait de naïveté et de spontanéité.
Deuxième mouvement, Adagio. Il commence par un premier thème solennel aux cuivres de caractère quasi wagnérien, suivi par un magnifique solo de violoncelle, sorte de lamento, dans lequel tout le registre de l'instrument, du do grave à vide au suraigu (cinq octaves plus haut), est utilisé (2). Cuivres et violoncelle vont alterner deux fois encore. C'est ensuite une marche funèbre qui débute aux deux flûtes, elle sera répétée par d'autres instruments et en particulier par les trois trombones accompagnés par le tuba; elle gagne en puissance pour atteindre un climax quand le thème de marche est repris par tout l'orchestre. Tout se calme et on entend le rythme de la marche funèbre au bloc de bois, piano. Après cet intermède, on assiste au retour du thème solennel du début, cette fois aux cordes; le célesta et le vibraphone interviennent et accompagnent le violoncelle dans le calme. Pour la dernière fois le thème solennel retentit aux cuivres et c'est ainsi que s'achève ce superbe et tragique mouvement.
Troisième mouvement, Allegretto. De caractère particulièrement narquois, ce scherzo nous réserve une foule de surprises grâce en particulier à des alliages de timbres inédits.
Quatrième mouvement, Adagio. Il commence par une citation textuelle du thème du Destin de l'Anneau des Nibelungen, continue avec une citation du prélude de Tristan et Yseut. Nous avions déjà remarqué ces citations dans l'adagio de la première symphonie. Le thème Tristan est suivi par une suite légère et détendue aux violons puis aux contrebasses. Un nouveau thème s'annonce aux bois puis aux cordes, il est interrompu par le thème du Destin aux cuivres avec un accompagnement aux timbales. Un développement commence alors sur le nouveau thème qui passe aux cordes tandis que le célesta égrène des notes au dessus de figurations de plus en plus complexes de l'orchestre. On atteint un climax d'intensité avec le retour de la marche funèbre du précédent adagio aux trombones, épisode que termine un coup de tam-tam. Rentrée on assiste au retour des deux thèmes wagnériens et de leur suite guillerette. Une coda géniale va alors débuter par trois accords bizarres et dissonants évoquant l'orgue, le célesta va rappeler le thème du début de la symphonie, un accord de la majeur s'installe aux basses, au dessus duquel répond un rythme étrange du bloc de bois et de la caisse claire, puis bloc de bois, caisse claire, vibraphone, célesta, xylophone vont projeter leurs notes isolées dans le néant, ronde d'électrons, très semblable à celles qui terminaient le scherzo et le finale de la quatrième symphonie. Toutefois le néant ici n'a pas le côté sinistre qu'il avait dans la symphonie précédente.
Quelle superbe symphonie! Son écoute procure beaucoup de plaisir et d'émotion. Malgré un premier adagio tragique, elle me semble relativement sereine, surtout après deux symphonies (13èmes et 14èmes) particulièrement noires. J'y vois DSCH tout à son plaisir de créer une architecture complexe et totalement convaincante au plan musical.