Le Cantatrice Villane (Les cantatrices villageoises), texte de G.Palomba, librettiste attitré de Paisiello et de Cimarosa et musique de
Valentino Fioravanti a été donné pour la première fois à Naples en 1798. Le sujet, un impresario aux prise avec sa troupe, a été traité de nombreuses fois au cours du 18ème siècle dans les opéras suivants: La Canterina (Joseph Haydn, 1766); L'Impresa d'Opera (Pietro Alessandro Guglielmi, 1769); L'Impresario in Angustie (1786) et Il Maestro di Capella (1790) (Cimarosa); Prima la Musica e poi le Parole (Salieri, 1786), Der Schauspieldirektor (Mozart, 1786) ainsi qu'au début du 19ème siècle: La Prova d'un'Opera seria (Francesco Gneco, 1803); I Virtuosi Ambulanti (Fioravanti, 1807); Le Convenienze Teatrali (Donizetti, 1827).
Le Cantatrice Villane est peut-être le chef-d'oeuvre du genre. Le tempérament comique de celui que Cimarosa traitait de clown s'y exerce pleinement dans une satire désopilante du milieu théatral, empreinte de retenue et de clairvoyance (1,2).
Synopsis. Don Bucefalo, musicien médiocre, est subjugué par le chant de quatre villageoises (Rosa, Agata, Nunziella, Giannetta) et leur propose d'être leur impresario. Flattées, elles posent comme condition de recevoir un enseignement musical. Don Bucefalo qui s'est épris de Rosa, accepte et demande à Don Marco, son élève, chanteur raté, secrètement amoureux de Rosa, de prêter un clavecin indispensable pour les leçons de chant. Don Marco consent à prêter son clavecin à condition de faire partie de la troupe comme chanteur. Alors que les chanteuses se disputent le rôle envié de "prima donna", Carlino, mari de Rosa que l'on croyait mort, débarque déguisé en officier espagnol et assiste furieux aux assauts galants de Don Bucefalo et Don Marco. Pour couronner le tout Don Marco qui n'a peur de rien, veut adapter l'Ezio de Metastase pour monter un opera seria. Lorsque la confusion est à son comble, Carlino révèle son identité et d'un coup de baguette magique (ainsi qu'avec l'aide des gens d'armes) tout rentre dans l'ordre, Rosa retrouve son époux et la pièce pourra être préparée dans une (relative) sérénité (3).
Style. On a là un livret typiquement bouffe et non dépourvu d'ironie que Fioravanti avec son sens inné de l'effet comique et de la caractérisation poussée des personnages va traiter magistralement en évitant les effets faciles et la vulgarité. On remarque aussi un effort inhabituel, dans ce répertoire, d'élaboration musicale ainsi que le rôle de premier plan de l'orchestre, partenaire à parts égales des acteurs.
Les sommets-Dans le quintette introductif, le très beau thème principal est d'abord chanté par les aspirantes cantatrices, ce sujet est ensuite repris par l'orchestre tandis que les jeunes femmes soutenues par Don Bucefalo (basso buffo) chantent une mélodie toute différente, l'effet est d'une harmonie merveilleuse.
-Le sommet de l'oeuvre est sans doute le génial trio du premier acte: "
Io diro se nel gestire...", dont la sonorité magnifique obtenue avec un petit orchestre de chambre évoque Rossini à son meilleur.
-Dans l'air de Carlino "
Dov'è la fé giurata...", le brillant solo de clarinette rappelle le rôle de cet instrument dans la Clémence de Titus de Mozart.
-L'étourdissant finale du premier acte est un feu d'artifice d'invention mélodique mis en valeur par un tissu orchestral brillant et incisif.
Dans le deuxième acte, on remarque le grand air de Rosa "
Misera dove son...". La chanteuse se moque d'abord de l'opera seria avec ses lourdeurs et ses conventions de manière désopilante puis prend son rôle au sérieux dans de belles vocalises napolitaines accompagnées par un orchestre très entreprenant.
Il existe un enregistrement Bongiovanni. L'interprétation est à la hauteur de l'oeuvre. Don Bucefalo est magistralement interprété par Giorgio Gatti (basso buffo) qui domine la distribution. Les autres rôles sont également très bien joués, en particulier Rosa (Maria Angeles Peters) et Carlino (Ernesto Palacio). Le recitatif secco est très soigné et les dialogues entre Don Bucefalo et Don Marco en dialecte napolitain particulièrement savoureux.
(1)
http://www.amadeusonline.net/almanacco/pag-2?r=&alm_sett=&alm_giorno=&alm_mese=&alm_anno=&alm_testo=Le+Cantatrici+villane(2) Roberto Tigani, Alessandra Doria, Le Cantatrice Villane, Incisione Bongiovanni, 1992.
(3)
http://www.delteatro.it/dizionario_dell_opera/c/cantatrici_villane_le.php