Joseph Haydn
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Joseph Haydn

(1732-1809)
 
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 interprétation des symphonies

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Benoît

Benoît


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MessageSujet: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeVen 22 Mai - 18:32

Je voudrais vous soumettre , surtout à Piero qui est musicien professionnel, 4 sujets de question(nements) pour l' interprétation actuelle des symphonies de Haydn (pour notre cas précis) car je viens de faire une "cure" discographique des interprétations de Thomas Fey constatant encore une fois à la réécoute que :

-les menuets souvent pris rapidement ( souvent à bon escient)contrastent avec la partie centrale (trio) qui ralentit beaucoup: sur quoi se base- t'il  pour de telles fluctuations de tempo, parfois à l'intérieur même d'un seul mouvement ?

- la sur-présence des cuivres, des percussions et notamment des timbales, qui dites "naturelles" claquent très souvent  sans discrétion: effet de la prise de son ? j' y vois un syndrome (post-) Harnoncourt, qui peut convenir à peu près à celles en ut majeur qui sont éclatantes mais pas toujours ;parfois ,une impression à peine exagérée de concerto pour timbales ou de fanfare.

- l' ornementation sur les reprises, parfois déroutante ( sur le menuet) : j' ai lu des choses, mais je ne sais plus où sur cette pratique :qu' en était-il à l' époque ? qu' en sait-on exactement ? autant cela est pertinent pour la période baroque et surtout pour la musique vocale , type aria da capo A B A mais avec Haydn , nous sommes en plein classicisme, alors ...

-l' utilité du continuo ( parfois envahissant ) dans ces symphonies; je crois de C. Hogwood explique très bien son choix ( de ne pas en avoir-ce que j' apprécie) dans sa semi-intégrale, dont je devrais ressortir les arguments dans les textes d' accompagnement; je crois me souvenir que J.Haydn dirigeait son orchestre du violon et non pas du clavecin.

En tout cas , la mode actuelle est ainsi et j' y vois parfois , souvent des maniérismes ; je ne dis pas qu' il faut rester forcément sur des interprétations genre Dorati ou Märzendorfer ( la toute première enregistrée et que j' apprécie vraiment dans sa globalité - une bonne surprise que ce coffret m' a procuré)

Qu' existe-t'il dans les traités de musicologie pour étayer ces choix ? questions ouvertes donc...
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Euclide-Orphée

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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeSam 23 Mai - 22:36

Des questions très intéressantes qui sont soulevées ici ...

Premièrement concernant le continuo je dirais qu'il ne faut pas sous-estimer son importance encore à la fin du 18ème siècle.
Il ne faut pas oublier que les orchestres étaient bien souvent moins grands et moins denses qu'aujourd'hui, la présence du continuo était encore un moyen de soutenir et remplir l'harmonie, que ce soit à l'église ou au spectacle.
Or si le continuo est présent c'est pour être audible, là encore il faut avoir plusieurs éléments en tête : premièrement bien des musiciens célèbres, de grands improvisateurs (dont Mozart) pouvaient diriger depuis le clavier (parfois pour les concerti par exemple : dans les manuscrits autographes des concerti pour piano de Mozart nous trouvons des indications qui demandent au piano de jouer la ligne de basse quand il n'a pas de partie solo, donc d'assurer le continuo ! C'est très clair dans la partition !), difficile d'imaginer qu'ils se contentaient du strict minimum à savoir plaquer discrètement 2-3 accords à peine audibles.
A ce titre j'aimerais souligner que si certains traités, à destination des amateurs, sont très sages dans leur description de la manière d'accompagner (prenons par exemple Corrette), d'autres sont monstrueux, et par exemple Heinichen, un compositeur allemand qui connaissait bien JS Bach, donne volontiers des exemples d'accompagnement où il préconise de doubler la basse et même d'accompagner à 8 voix avec les accords pleinement remplis, chose qu'aujourd'hui encore on entend rarement. Naturellement Heinichen est un compositeur purement baroque et contemporain de Bach, mais je dis ça juste pour dire que même dans la musique baroque interprétée par des spécialistes les musiciens sont parfois timorés dans l'accompagnement par rapport à certaines sources.
Personnellement je ne doute pas qu'un clavieriste célèbre et grand improvisateur dirigeant un orchestre depuis le clavier devait se faire plaisir et mettre en avant toutes sortes de fantaisies. Encore une fois méfions-nous des limites des traités destinés à apprendre la musique aux amateurs.
Je ne pense pas que l'art du continuo qui était le coeur de la musique baroque ait pu dégénérer et disparaître en l'espace de quelques décennies seulement (entre les années 1760 et les derniers opréas de Rameau et les années 1780 des symphonies parisiennes de Haydn il n'y a que 20 ans ...).

Deuxièmement il faut voir que les orchestres étaient historiquement davantage tournés vers la basse pendant longtemps (avec des variations selon les pays sans doute mais tout de même), ainsi il est certain qu'une certaine clarté de la basse et du continuo en découle naturellement.

Dans les 24 violons du roi de Lully il y avait autant de basses que de dessus de violon (6 chacun), avec des voix internes divisées en 3 groupes égaux (4 haute-contres, 4 tailles et 4 quintes de violon, plus tard remplacées par l'alto), ce qui montre que l'esthétique baroque accordait une immense importance à la basse, porteuse et guide de l'harmonie, ainsi qu'à l'équilibre des voix. Déjà ça donne une idée d'où on vient, pour voir où on est allé (une dilution progressive de la basse au profit des dessus, mais qui se fait par étape).

Il est possible de trouver des descriptions plus tardives d'orchestres, comme celle de Rousseau décrivant l'orchestre de Dresde en 1764, qui se compose de :
2 clavecins, 3 double-basses, 3 violoncelles, 5 bassons, 2 cors de chasse, 4 altos pour 5 hautbois, 2 flûtes, 8 premiers violons, 7 seconds violons, trompettes et timpani.
Bref, un ensemble qui me semble là encore assez lourd dans le grave !

J'ai un livre intitulé de Lully à Mozart, aristocratie, musique et musiciens à Paris, qui entre autre information relate la constitution de nombreux ensembles dans les années 1760, 70 et 80 en France au service de l'aristocratie, et très souvent ces ensembles de musiciens sont constitués de 10 à 20 personnes maximum, ce qui fait de beaux ensembles mais pas énormes non plus (c'est tout à fait comparable à ce que Haydn avait à disposition à Eisenstadt, allant de 13 à 24 musiciens), et ils jouaient la musique de leur temps : les symphonies, entre autre celles de Haydn ... quand on est ainsi en comité un peu réduit il va de soi que le continuo prend toute son importance et qu'il doit remplir le son et être audible, c'était dans l'esthétique du temps.
Je ne sais pas si vous avez parfois eu l'occasion d'aller écouter de toutes petites productions d'opéras, de projets en petit comité d'étudiants, mais lorsque ça arrive, il est salvateur d'avoir un clavecin à la direction pour soutenir la musique ! Sans ça ça ne sonne tout simplement pas ... Or tout le monde à l'époque n'était pas richissime au point d'avoir un gigantesque orchestre à disposition chez lui.
Si vous regardez l'orchestre au service du prince de Conti jusqu'en 1771 il y avait encore un luth, un clavecin et une harpe ! Rien que ça.
Il faut aussi dire qu'on faisait avec les musiciens qu'on avait à disposition, si la fille d'un telle était harpiste ou autre on s'arrangeait, la musique est fonctionnelle et adaptative, ce n'était pas l'époque du CD et des orchestres uniformisés.
Par ailleurs dans un effectif plus petit et bien naturellement les cuivres (s'il y en a, et très souvent c'est le cas : n'oublions pas que les aristocrates avaient des ensembles de chasse), notamment, vont ressortir avec force et avec brio.

Si l'on prend les orchestres de 1773 de l'académie royale de musique et du concert spirituelle cela donne :
Académie royale de musique : 22 violons, 5 altos, 9 violoncelles, 6 contrebasses, 5 hautbois, 1 clavecin, 8 bassons, 2 cors, 1 trompette, 1 timbale.
Concert spirituel : 24 violons, 4 altos, 10 violoncelles, 4 contrebasses, 2 flûtes, 3 hautbois, 2 clavecins, 4 bassons, 2 cors, 2 trompettes, 1 timbale.
Une autre source (qui parle des effectives de l'académie royale jusqu'en 1790) me donne pour l'orchestre de l'opéra de Paris : 28 violons (4 surnuméraires), 6 altos, 12 violoncelles, 4 contrebasses, 2 flûtes, 4 hautbois, 8 bassons (puis réduits à 4 après 1778), 2 clarinettes, 2 trompettes, les trombones selon les besoins (invités ou double emploi, peut aller jusqu'à 5) et naturellement 1 clavecin.
Notez la lourdeur de ces compositions d'orchestre avec parfois 8 bassons !

On sait que lors des concerts des symphonies londoniennes de Haydn à Londres elles étaient dirigées depuis le pianoforte ou le clavecin : donc le continuo était bel et bien présent.
Si on y réfléchit 2 minutes le continuo était évidemment extrêmement présent à l'opéra, c'est la base inaliénable du récitatif.
Il n'est jamais mort à l'église, l'orgue étant largement utilisé pour accompagner les chants, l'orgue a toute sa place pour accompagner les oratorios et les messes.
C'est en un sens une bizarrerie de croire que dans un tel contexte le continuo serait totalement absent de la musique orchestrale par ailleurs, dans les symphonies, divertissements et autre ... Surtout quand on sait que très souvent le chef était assis su clavecin ! Ce n'est pas encore l'époque de la baguette de direction moderne.
Quelle différence entre une ouverture d'opéra et un mouvement introductif de symphonie ?
D'autant que nous avons des traces écrites de continuo dans les concertos pour piano de Mozart, ou d'autres exemples de la présence d'un instrument à clavier dans certaines symphonies (l'une, de Haydn, est bien connue, mais il y en a d'autres : chez Wolfl par exemple, symphonie en sol mineur op 40 de 1803).
C'est une habitude qu'on a perdu car notre oreille a été modelée sur des enregistrements moins informés mais qui fait sens dans le contexte ... Je ne dis pas que c'est nécessairement systématique, si l'orchestre est très gros peut être était-ce dispensable ou peu audible, si on est sur un orchestre plus commun et plus réduit comme c'était le cas dans de nombreuses cours qui n'avaient pas le faste de la France probablement que le continuo restait très présent.
Il ne faut pas oublier que les dernières reliques de l'époque baroque, Rameau, Telemann, Mondonville, Hasse ne sont morts que dans les années 1760, 1770 voire 1780 pour Hasse qui aura connu une évolution énorme du monde musical à sa mort à 84 ans. Et si la mode change vite, certaines habitudes ont tout de même la vie dure, notamment dans l'organisation des orchestres.
Par ailleurs la musique plus ancienne n'était pas nécessairement passée de mode, en France on jouait encore les grands motets à l'église, ainsi que des opéras de Lully jusqu'à la révolution. Imaginez qu'on joue encore Armide en 1790 et 1791 à Paris en pleine révolution !
En Angleterre Handel n'a jamais été passé de mode, Haydn a pu profiter pleinement de la vénération réservée à ce compositeur lors de son voyage à Londres. La musique de Corelli est encore éditée avec grand succès dans les années 1780.
En Autriche sous l'influence de Von Swieten, Mozart arrange le Messiah et Acis et Galatée de Handel ...
Donc si des changements esthétiques certains sont apparus (par exemple chez Mozrat on adoucit l'orchestre en remplaçant des parties de cuivre par des clarinettes et des flûtes), il ne faut pas non plus considérer l'époque comme une coupure nette qui fait totalement table rase du passé.
Le continuo n'a pas disparu du jour au lendemain des salles de spectacle, c'est un processus long qui nous conduit non pas dans les années 1780-1790, mais bel et bien au 19ème siècle.
Les traités des compositeurs galants comme Quantz parlent encore du continuo, et pour le reste s'il est moins noté et évoqué qu'avant c'est sans doute car par rapport à la musique baroque l'harmonie et le contrepoint ont été largement simplifié (donc en fait les chiffrages ne sont plus vraiment nécessaires) et que cela ne nécessite pas de grands discours pour accompagner une symphonie classique ordinaire.

Je suis sûr que les effectifs précis que Haydn a connu à Londres et au service des princes Esthérazi doit être documenté précisément dans le libre de Marc Vignal mais la chose étant épaisse je n'ai pas l'information spontanément, il faudrait chercher ...

Concernant l'ornementation je pense que c'est une erreur de croire qu'on ornait moins à l'époque classique qu'à l'époque baroque.
L'improvisation massive et l'ornementation richissime sont des caractéristiques qu'on retrouve encore dans la musique romantique, mais que les musiciens, de nos jours trop formatés par le prétendu "urtext" et soucieux d'une fausse authenticité à ne jouer que ce qui est écrit, ne savent ou ne veulent plus faire.
Lorsque Adelina Patti chante pour Rossini en 1860 il lui répond qu'il ne reconnait même plus sa composition tellement c'est orné !
Le fameux prélude op 9-2 de Chopin, que tous les pianistes jouent, existe en vérité sous, si je ne dis pas de bêtise, 14 versions différentes corrigées et ornées par Chopin sur différentes partitions données à ses élèves (par exemple voici une version authentique qu'on n'entend pourtant plus jamais aujourd'hui : https://www.youtube.com/watch?v=VRmek8kADWA). En gros il donnait une version différente à chaque élève ... allez savoir comment lui jouait ça en concert, assurément pas comme nos pianistes modernes !
Merveilleusement nous avons quelques traces de ces improvisations du 19ème siècle dans certains enregistrements d'anciens pianistes, ou d'élèves des grands maîtres. Mais entre d'Anglebert et ses folles ornementation (un trille ou un mordant toutes les 2 notes, des ports de voix partout etc...) et les maîtres du 19ème siècle, il me paraît absurde de croire que l'époque classique, elle, était une époque stricte et peu ornée : cela ne fait pas sens.
Les grands compositeurs de l'époque classique, Mozart ou Beethoven pour ne citer qu'eux, étaient de réputation d'immenses improvisateurs, caractéristique qui était fortement associée au fait d'être un grand musicien (on organisait régulièrement des concours d'improvisation).
Mozart dit dans une lettre à sa soeur qui a trouvé un passage très vide dans une partition qu'il lui a envoyé que lorsqu'il joue ses concertos il joue "la première chose qui lui passe par la tête" et que donc les partitions sont parfois poreuses, incomplètes, il lui propose ensuite une façon d'ornementer le passage en question !
C'est plutôt de jouer Mozart sans ajouter d'ornementation et sans improviser qui est, selon l'esthétique de l'époque, une bizarrerie voire, si on pousse la logique, l'assurance d'être un piètre musicien (ou du moins un amateur), car un musicien talentueux est évidemment quelqu'un qui va savoir improviser et orner les pièces qu'il joue à l'époque (on ne réfléchit et ne juge plus de la même façon aujourd'hui mais à l'époque c'est une évidence). C'était aussi évident d'orner et de modifier la musique que ça ne l'est aujourd'hui de ne rien toucher et de jouer uniquement ce qui est écrit, on a complètement retourné le rapport à la musique.

Bien sûr dès lors que l'on parle d'orchestre la chose est plus complexe, les musiciens répétaient souvent très peu ...
L'orchestre était sûrement beaucoup plus chaotique que ce que nous avons aujourd'hui (Rousseau fait un bilan épouvantable de l'orchestre de l'opéra de Paris par exemple), et ajouter des ornementations n'est dans ce contexte pas simple. Si un soliste se détache de l'orchestre, dans une pièce concertante, naturellement il devra orner (comme le ferait un chanteur). Dans une symphonie plus classique c'est beaucoup moins évident.
Esthétiquement il serait logique de le faire, et d'ailleurs la reprise est aussi un peu là pour ça (mais il est bon de noter que la reprise n'était pas systématiquement jouée autrefois), dans les faits c'était peut être plus difficile à réaliser.
Cela dit en admettant qu'on ait un orchestre professionnel avec une qualité de jeu aussi sophistiquée que ce qu'on a aujourd'hui et bien on peut se permettre d'orner, c'est dans la logique esthétique de l'époque.

En tout cas oui je dirais que dans l'ensemble de nombreuses recherches ont été faites pour en arriver à ce résultat et que s'il est parfois déroutant lorsque l'on est habitué depuis toujours à des enregistrements calqués sur un enseignement du 20ème siècle, dans leur contexte musicologique cela fait parfaitement sens.
Robert Levin est quelqu'un de passionnant à écouter parler de Mozart si d'aventure vous cherchez des informations sur le continuo ou l'ornementation par exemple !

J'espère que quelqu'un pourra apporter des précisions relatives à Haydn spécifiquement sur les effectifs des orchestres qu'il a connu et le contexte exact.
Donc remarquez que ce que je dis sur les orchestres français correspond environ à la façon dont les symphonies parisiennes étaient interprétées.

----------------

J'ai isolé quelques passages intéressants tirés de la correspondance de Haydn.
Voici une première lettre de Haydn décivrant les nouveaux piano et clavecins anglais comme de parfaits instruments et capables de diriger tout type de performance musicale (pas seulement les voix) :

interprétation des symphonies Xdot

Ici il nous confirme que Clementi dirigeait encore dans les années 1790' ses symphonies depuis le pianoforte :
interprétation des symphonies Iysq

La plupart des sources décrivant les concerts de l'époque londonienne de Haydn démontrent qu'il était très courant de diriger depuis le clavier.
Et il ne faut pas oublier que souvent les concerts étaient très variés, avec des alternances entre des mouvements de symphonies, des extraits d'opéras (donc des airs accompagnés parfois par le piano solo, Haydn l'évoque en disant qu'il a accompagné un air de Purcell tout seul au piano), des pièces solo etc... Donc on avait toujours besoin d'avoir un piano ou un clavecin à disposition.

Voici un exemple de programme des concerts de Salomon à Londres :
interprétation des symphonies F9sg
Comme on peut le constater tout est mélangé.
Et la présence récurrente d'aria parfois avec récitatif indique bien qu'il y a toujours un clavier accompagnateur présent dans l'orchestre : à partir du moment où l'instrument est là on s'en servait.
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Piero1809
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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeLun 25 Mai - 9:20

Je répondrai d'abord à Benoît.

D'abord, je ne suis pas musicien professionnel. Certes, je joue dans un orchestre symphonique mais en tant qu'amateur. Cette activité très intense (avant le confinement) m'a permis de jouer plusieurs symphonies de Haydn.

1. Concernant les tempi des menuets et des trios, je ne dispose d'aucune information particulière. Les tempi sont souvent indiqués par le compositeur et il convient de les respecter. En général le tempo d'un menuet est mesuré (allegretto, allegro moderato) ce qui est normal pour une danse de caractère aristocratique. Parfois Haydn indique allegro, parfois, il ne donne aucun tempo. Je suis outré de constater que certains chefs jouent presto alors que Haydn a noté allegretto, un contre-sens. Cela me semble également un contre-sens de ralentir le trio. Certes la partie centrale possède souvent un caractère plus populaire et plus intime que le menuet. S'il doit y avoir ralentissement, il existe le plus souvent dans l'écriture (des noires au lieu de croches) et il n'est pas besoin d'en rajouter.

2. Les cuivres. C'est un point intéressant. Quand Bruno Walter ou Karajan jouent la 40ème symphonie de Mozart, ils disposent de cinq contrebasses et les autres cordes à l'avenant. Avec les baroqueux on a deux contrebasses et parfois une seule. Par contre le nombre des vents est invariable: les hautbois, les bassons, les cors, les trompettes, les timbales par deux. Le ressenti est donc très différent selon que les cuivres jouent avec 50 violons ou bien seulement une dizaine (comme c'était le cas à Eszterhàza). C'est cette option qui est la plus authentique et quand le chef dispose d'un grand effectif il doit faire résonner très fort ses trompettes et ses cors. Marc Vignal signale que Haydn utilise ses trompettes dans le registre aigu de leur tessiture, d'où une sonorité perçante qu'il adore et privilégiait les cors alto avec le même effet. Mozart devait avoir mal à ses oreilles car il n'aimait pas les sonorités aigües.

3. L'ornementation. Giovanni Antonini varie les reprises des menuets et surtout des trios et c'est une très bonne chose. C'est même une pratique indispensable afin d'éviter la sensation d'ennui liée aux inévitables répétitions. Cela demande du travail supplémentaire et beaucoup de goût. J'aimerais que les instrumentistes disposent de plus de liberté au cours d'une exécution live. S'ils se plantent, ce n'est pas grave mais si ça marche, cela peut être merveilleux. Après tout la structure du menuet et trio est bien AABBAA et en variant on obtient AA'BB'AA", soit une structure proche de l'aria da capo. Dans certains concertos pour pianoforte, Mozart a écrit un canevas qu'il faut absolument remplir avec une improvisation. Personne ne le fait et le résultat est ridicule notamment dans le sublime adagio du concerto en la majeur K 488.

4. Le cembalo. Difficile de répondre. Antonini (comme Hogwood) a banni le clavecin y compris dans les symphonies antérieures à 1760. Lui et bien d'autres argumentent comme tu l'as fait. Haydn dirigerait au violon. C'est vrai mais cela n'empêchait pas qu'il y eût un cembalo dans l'orchestre de Haydn. Le solo de clavecin dans le finale de la symphonie n° 98 me semble le révélateur de la présence d'un instrument généralement très discret que le facétieux Haydn réveille quand il voit que son musicien s'endort. A l'écoute des symphonies de jeunesse qui ont encore des traits baroques, le clavecin me semble indispensable dans les mouvements lents écrits pour cordes seules. On ressent un vide en son absence car le continuo dans ce cas est un lien indispensable qui permet de soutenir la mélodie et de combler des creux.





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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeLun 25 Mai - 13:59

Je vais partager d'autres sources concernant le continuo.

Tout d'abord voici un premier document, c'est un extrait (les 3 premières pages) de la partie solo du concerto pour piano KV 414 de Mozart telle que publiée par Artaria en 1785 :

Spoiler:

Comme vous pouvez le constater il est attendu du soliste qu'il réalise le continuo et tous les chiffrages sont indiqués. C'était la façon ordinaire de publier les concerto pour clavier à l'époque : la basse continue est présente et attendue de la part de l'interprète.
Lorsqu'il n'a pas de partie soliste à interpréter, il joue avec la basse, indication que l'on retrouve dans les manuscrits originaux de la main de Mozart qui indique "ColB" sur la partie de piano quand il a terminé son solo.
D'autres livres m'ont appris que nous avions des concerti avec la basse chiffrée écrite de la main de Leopold, Nannerl et même certains de Mozart en personne.
Nous avons donc des preuves absolues du rôle de continuiste qu'avait le pianiste ou le claveciniste dans le cas d'un concerto pour clavier de Mozart même à la fin du 18ème siècle et pourtant aujourd'hui encore énormément de musiciens et de chefs renient ce fait indiscutable parce que ça ne sied pas à leurs habitudes et à leur vision du concerto (l'idée du soliste qui fait le continuo brouille la distinction très nette entre la partie solo et la partie orchestre, mais ce sont des constructions a poesteriori que nous avons, non la vérité historique).
Evidemment sur piano moderne, dont la sonorité tranche tant avec l'orchestre, jouer le continuo est affreux, mais quand on écoute cela sur piano historique tout fait sens.
Dans tous les cas en ayant cette donnée on peut réfléchir quelques instants : mettons qu'on joue un concerto et une symphonie dans le même concert ... l'artiste, ici Mozart, joue la partie piano pour se mettre en scène, et il jouera le rôle de continuo dans le concerto, pensez-vous qu'il va mettre le piano de côté et diriger la symphonie qui suit différemment du concerto ? Pourquoi le continuo serait-il utile pour remplir et soutenir l'orchestre dans le cas d'un concerto mais, inutile voire nuisible dans le cas d'une symphonie interprétée par le même orchestre avec les mêmes effectifs ?
La symphonie est esthétiquement et en terme d'effectif totalement comparable au concerto ou à l'ouverture d'opéra qui, les deux, supportent très bien la basse continue. C'est intéressant de noter d'ailleurs qu'à Londres dans les années 1790 sur les programmes de concert on appelle encore régulièrement les symphonies, dont celles de Haydn, des "ouvertures".

J'ajoute une page manuscrite autographe où Mozart écrit bien de jouer le piano "colB" (la même indication apparaît pour les bassons) :
Spoiler:

Si vous regardez le manuscrit original du requiem vous y verrez clairement indiquer l'orgue avec la basse, ainsi que la présence d'une basse chiffrée ce qui est tout à fait normal pour les pièces religieuses.

Nous savons donc que le continuo était très présent : à l'église pour les messes et les oratorios, à l'opéra, et pour les concertos.
Quelle est la probabilité dans ce contexte que spécifiquement pour la symphonie il soit rejeté ? Très faible ...
D'autant que nous avons des témoignages du contraire : la direction se faisait très souvent au clavier, et si certains le font au violon il ne faut pas se méprendre, dans l'orchestre il y a toujours un chef et un premier violon qui avait, autrefois et parfois aujourd'hui encore, une importance quasiment égale sinon même supérieure au chef d'orchestre. Si quelqu'un dirige au violon et joue le rôle de 1er violon, cela n'empêche pas que par ailleurs il y ait un continuiste dans l'orchestre.
On sait d'ailleurs que dans certains orchestres des années 1760 / 1770 (par exemple celui de Dresde, celui du concert spirituel) il y avait encore rien de moins que 2 clavecins : un pour le chef au centre, et un sur le côté pour l'accompagnateur attitré de l'orchestre.

Si j'ai évoqué Heinichen c'est aussi pour souligner une chose : nous avons parfois des chefs très informés, mais nous avons aussi surtout des chefs qui font des choix, ont leur goût et leur parti pris.
Ils font un travail remarquable mais ils tranchent aussi, et parfois en-dehors de ce que pourraient préconiser certaines sources.
Voici des exemples d'accompagnement donnés par Heinichen (qui précise d'ailleurs que par-dessus ça il faudrait encore ajouter une ornementation variée) qui m'avaient étonnés lorsqu'on m'en avait parlé en cours de basse continue :

Spoiler:

L'accompagnement pouvait être extrêmement rempli et extrêmement lourd (on parle de la fin de la période baroque, dans ce que Heinichen décrit comme la façon moderne et initiée d'accompagner), mais aujourd'hui on reproduit peu ce genre de choses dont on a pourtant des attestations précises de l'existence pour la fin de la période baroque.
En vérité la plupart des chefs n'aiment pas le continuo et demandent souvent au clavecin d'accompagner assez discrètement. On me parlait souvent de cet état de fait en cours de basse continue justement, que parfois le chef va jusqu'à demander au clavecin de jouer la queue fermée ou de ne pas jouer du tout, et en effet nous avons certains chefs qui décident de bannir le clavecin de leur orchestre.
Tout ça ce sont des parti-pris esthétiques qui n'engagent que ceux qui les prennent, mais qui ne font pas office de vérité historique absolue.

Pour moi il est évident compte tenu des témoignages du fait qu'on dirigeait encore les symphonies depuis un piano ou un clavecin dans les concerts londonien des années 1790 (j'en ai donné un exemple avec Clementi) qu'il est logique que le continuo soit présent dans la symphonie classique du 18ème siècle (ce qui en veut pas dire que sa présence est écrasante, nous avons des orchestres à ce stade de l'histoire assez robuste sur le plan sonore).
Son absence est déjà un peu douteuse pour les oeuvres des années 1780-1790, mais elle est carrément invraisemblable dans les années 1760 et 1770 où on avait encore des orchestres avec 2 clavecins et où il n'y avait pas un orchestre de cour sans un ou plusieurs instruments accompagnateurs.

J'ai aussi cherché dans mes documents pour voir ce que j'avais en terme de traité de basse continue et j'ai retrouvé un traité de William Crotch, un compositeur anglais, qui publie encore un traité de basse continue très étoffé en 1812.

Moi je crois véritablement que l'extinction du continuo dans la 2nde moitié du 18ème siècle n'est rien de moins qu'un mythe qui n'est pas soutenu par les sources d'époque, mais qui est accommodante pour le goût moderne habitué à cette musique sans tenir compte de cette donnée.



Pour ce qui est des tempis c'est un sujet très intéressant dont j'ai oublié de parler mais nous pourrions aussi citer des sources.
Avec l'invention du métronome nous avons des tempis pour Mozart ou Haydn qui nous sont donnés par Neukomm, Hummel ou Weber, compositeurs et élèves dont la proximités avec les maîtres en font des sources intéressantes (quoi que pas forcément absolues, chacun se fera son opinion). Certains tempi sont donnés dans les arrangements pour piano des symphonies par exemple, on peut à ce titre garder en tête que souvent nous jouons plus vite en tant que soliste au clavier qu'un orchestre ne le ferait.
En faisant la part des choses entre ces indications métronomiques et les traités plus anciens, dont Quantz qui donne dans les années 1750 énormément d'indication pour mesurer le tempo en se basant sur la pulsation cardiaque, nous arrivons probablement à avoir une bonne idée de ce que ces tempi étaient (même si naturellement d'un pays à l'autre, d'un chef à l'autre, d'un compositeur à l'autre, on sait que déjà à l'époque il y avait beaucoup de variations de tempo).
Notons tout de même que plusieurs sources du 18ème siècle attestent que les tempi ont accéléré pendant le siècle et qu'on joue bien plus vite en 1800 qu'on ne le faisait en 1700 et en 1750 !
W. Crotch, T. Young (qui propose un petit tableau des tempi en fonction du compositeur que je partagerais avec vous volontiers, il faut que je retrouve le document), I. F. K Arnold (qui dit qu'un tempo d'Andante de 1806 est un Allegro ou Allegretto de 1750) et Stockel (qui affirme que le tempo de l'allegro a accéléré de 1/3 en 50 ans) se rejoignent sur cette observation, probablement parmi tant d'autres ...
La fin du 18ème siècle et le début du 19ème sont des époques où le goût pour la vitesse s'est d'évidence largement développé.
En tous les cas le sujet du tempo est à la fois fascinant, riche, mais sans doute compliqué, bien qu'à la fin des fins la règle ultime a toujours été : jouer cela avec une oreille et un jugement musical. A ce titre il n'y a pas vraiment de bonne réponse en matière de tempo, seulement de bonnes ou mauvaises interprétations.
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Piero1809
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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeLun 25 Mai - 17:29

Merci beaucoup Euclide-Orphée pour votre premier texte. Je lirai le suivant ultérieurement.

Vos données concernant le continuo sont tout à fait pertinentes et j'y souscris pleinement. Je suis très sensible à ce rapprochement que vous avez fait entre le Rameau des Boréades et le Haydn de la symphonie n° 85 La Reine (seulement 22 ans d'écart!). Certains auteurs assimilant cette symphonie à une suite: Ouverture (introduction lente et allegro), aria, menuet I, menuet II, Gigue, je me demande quel effet ferait un clavecin bien audible notamment dans la fameuse ariette variée.

J'ai été particulièrement intéressé par vos propos sur l'ornementation. Votre exemple musical, ce nocturne de Chopin est vraiment démonstratif. Les concertos de Mozart offrent maintes occasions de broder autour d'un canevas que nous propose le compositeur à certains passages de l'oeuvre et je ne comprends pas pourquoi les interprètes s'en tiennent à une lecture servile du texte. Manque de culture musicale ou peur de prendre des risques, je ne sais pas mais dans certains cas, cette retenue frise l'absurdité. Je ne sais pas si vous connaissez l'ouvrage de C.W. Girdlestone, Mozart et ses concertos pour piano (Desclée de Brouwer) qui traite de ce sujet de façon approfondie.

J'ai écouté récemment Il trionfo del tempo e del disinganno de Haendel et j'ai eu le plaisir de constater que le premier violon variait généreusement sa partie lors du da capo d'un air. Pour la chanteuse c'était normal de varier le da capo mais je ne l'avais jamais vu faire à l'orchestre et le résultat était très convaincant!
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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeLun 25 Mai - 18:36

Je ne connais pas ce livre traitant des concerto pour piano de Mozart mais je me ferais une joie de le découvrir si j'arrive à mettre la main dessus.
Personnellement j'ai beaucoup appris sur ce sujet (entre autre) grâce aux conférences, écrits et démonstrations de Robert Lévin (mais d'autres livres arrivent aux mêmes conclusions car à la fin des fins les preuves tangibles sont là). Je crois qu'à ce jour la plupart des musicologues sont de toute façon d'accord sur l'essentiel (tant dans la part importante de l'ornementation et l'improvisation que du continuo dans les concerti) mais que les musiciens, eux, bien souvent dogmatiques, fermés voire tristement peu informés (ou faisant semblent de ne pas savoir ...), ne suivent pas.

L'anecdote que j'ai raconté sur la soeur de Mozart lui demande des précisions je l'ai retranscrite (on remarque que Mozart ne respecte même pas son guide initial mais change à la 3ème mesure le ré aigu pour un fa pour spectaculaire) :
Spoiler:
A ce jour c'est une anecdote bien connue vu qu'on en a une trace écrite de la main de Mozart donc bien des pianistes jouent l'exemple qu'il a envoyé à sa soeur sauf que :
1- il y a plein d'autres endroits dans différents concerti qui sont du même acabit et que bien des pianistes laissent vide, pour un effet dès plus ridicule comme vous le soulignez très justement !
2- Mozart n'a jamais dit que c'était la seule façon de remplir ce passage mais ne fait que donner un exemple qu'il n'est pas obligatoire de reproduire naïvement, l'interprète peut faire preuve d'imagination.
Donc de façon assez hilarante il y a des cas où des pianistes jouent ces oeuvres sans ornementation nul part ailleurs que dans ce passage précis dans lequel ils font la petite proposition de Mozart à sa soeur et ça s'arrête là : personnellement je n'appelle pas ça une performance informée.

Le même problème se retrouve avec certaines cadences.
On entend souvent jouer la cadence de Mozart mais ce n'est qu'un exemple qu'il a écrit pour une élève qui n'était pas capable d'en improviser une en direct, nul doute que Mozart lui changeait à chaque occasion et était capable de l'improviser sur le moment (comme il le dit si bien lui-même : il jouait systématiquement ce qui lui passait par la tête).
Les exemples écrits d'ornementation sont des exemples ... parfois à destination de musiciens qui ne savaient pas improviser et orner spontanément. Ces exemples sont des guides mais on peut trouver les nôtres, dommage que si peu se prêtent à l'exercice ou de façon beaucoup trop localisée et unique ce qui rend le tout peu cohérent.

Pour des exemples d'ornementation dans Mozart je crois ne pas me tromper en disant que les réductions pour piano de Hummel sont intéressantes, notamment dans les mouvements lents.
J'ai eu vent du fait qu'un certain Hoffmann aurait aussi publié, début 1800, des versions ornées de passages de concerti de Mozart avec l'idée d'être représentatif des performances du compositeur mais je n'ai jamais pu mettre la main dessus (je ne sais pas si c'est publié quelque part).

J'ai un ouvrage d'Eugène Borrel sur la musique baroque française qui date de 1933 et qui contient une quantité d'informations absolument prodigieuse ... le livre n'est pas énorme, mais c'est un condensé de savoir.
Or quand j'ai trouvé ce livre par hasard dans une brocante je me suis dit : comment est-ce possible qu'un tel savoir musicologique pointu soit disponible dès 1933 et que personne n'en tienne compte pendant encore des décennies ?
On pourrait faire la même remarque sur des recherches menées par Landowska ou autre ...
En vrai il y a beaucoup de choses qu'on sait pertinemment et depuis fort longtemps sur la période classique mais qui, curieusement, sont laissées de côté. On prétend que ça n'existe pas car on ne veut pas bouleverser la tradition du 20ème siècle.
Alors évidemment aujourd'hui on a des orchestres spécialisés qui font un travail formidable et qui rebattent les cartes, mais parfois même eux sont assez sélectifs dans l'importance qu'ils donnent à certaines sources.
En l'occurence le cas du continuo chez Haydn est assez révélateur pour moi d'un moment où le goût personnel des chefs (qui souvent n'aiment pas trop le continuo) prend le pas sur les sources historiques à la place de réfléchir en se disant "comment je peux faire pour que ça sonne de la façon la plus satisfaisante possible". Alors évidemment personne n'est obligé d'appliquer tout ce qu'on lit dans telle ou telle source, et de toute façon on trouvera toujours des contradictions, donc les artistes font ce qu'ils veulent dans l'absolu, mais je crois qu'il est aussi bon parfois de se forcer dans une certaine direction et de voir si le goût peut évoluer et si on peut recréer une habitude.
Et moi je trouve qu'on s'habitue vite au continuo honnêtement ...
J'ai entendu Levin jouer les concerti pour piano de Beethoven dans lesquels il tient le continuo et franchement ça sonne incroyablement bien. D'autant que le pianoforte a un son plus doux et boisé que le clavecin qui se fond très bien dans l'orchestre.
Je crois par contre que parfois ils ont des difficultés pour enregistrer, car souvent ils placent un micro dans le piano de façon à faire ressortir l'instrument solo, le problème c'est que si le piano joue en continu et fait l'accompagnement et bien là, à cause de la position du micro, l'accompagnement peut devenir écrasant.
Mais je crois qu'on est juste trop habitué à des rapports sonores entre piano et orchestre qui sont modernes et adaptés à des pianos en fonte d'aujourd'hui. En vérité avec un pianoforte historique le soliste est loin d'avoir une présence écrasante sur l'orchestre.

Je me demande : avez-vous les effectifs précis des orchestres que Haydn a connu au service de son prince puis lors de son voyage à Londres ? Car je dois dire que je ne trouve plus ces informations !

Du reste voici le tableau récapitulatif de Thomas Young (fameux scientifique s'il en est mais qui a écrit sur la musique, on ne lui doit pas des ouvrages de physique) qui est une généralisation considérable et donc peu applicable mais qui donne une vague idée des rapports de vitesse d'un compositeur à l'autre :
Spoiler:
Naturellement c'est un point de vu anglais du début du 19ème siècle, or on sait que d'un pays à l'autre il y avait parfois des traditions différentes relatives à la vitesse des oeuvres.

Il faudra que je vérifie mais je crois que William Crotch (en 1800), qui nous donne une très grande quantité de tempi, donnent parfois des tempi très vifs pour les menuets, il faudra que je vérifie ça et surtout que je les traduise car il donne ses tempi en longueur de pendule ... Je me souviens qu'il cite des exemples de Haydn (des passages des dernières paroles du Christ en Croix, et au moins des extraits de 1 ou 2 symphonies) mais je n'avais pas pu identifier les sonates à cause de problème de nomenclature.
Remarquez que sur un autre topic j'ai publié les tempi donnés par Neukomm pour La Création qui sont une source intéressante, chacun peut les essayer et se mettant au piano avec la réduction de Czerny !
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Benoît

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MessageSujet: Re: interprétation des symphonies   interprétation des symphonies Icon_minitimeMar 26 Mai - 21:34

Lire vos posts très éclairés est vraiment passionnant .

Piero, tu n' es peut-être pas professionnel, mais ton érudition et ton acuité d'analyse musicale n' en restent pas moins fascinantes

Merci Euclide-Orphée pour toutes ces précisions si pertinentes.Vos connaissances sont impressionnantes.

Je n' ai pas le temps de reprendre tout cela en détail mais tout ce que je peux dire ,en tant que mélomane est :

-un disque ( point de départ du sujet) et un concert en petite ou en grande salle , ce n' est pas forcément la même chose

-tout dépend de la perception qu' on a ou qu' on veut bien entendre d' une interprétation, qu' elle tend comme actuellement de la volonté de ce qu' on croit savoir de l' exécution instrumentale de l' époque ( " historiquement informée" ) ou qu' on s' en éloigne ,avec le formalisme , les habitudes qui se sont greffées jusqu' à nos jours.Bref ,Haydn par Dorati, est-ce bien Haydn ? mais par Antonini, est-ce plus Haydn que lui ?

- il est évident que dans ce vaste corpus qui court sur une 40aine d' années,on ne peut pas " mettre dans le même panier " les premières symphonies, post-baroques et les Londoniennes par exemple; exécuter une oeuvre à Esterhaza, Eisenstadt en privé ou à Paris ou Londres ,en public, ce n' est pas pareil. Tout est à nuancer.

Piero m' a donné envie de me replonger dans le livre de Girdlestone sur les concertos de piano de Mozart qui est le premier livre ( toujours pertinent même daté de 1939 rév.1952) que j' ai acheté en ligne au début d' Internet il y a plusieurs années et je retrouverai les références à l' ornementation qui ne concerne pas seulement le K. 537.

Et rechercher dans le Grove/ Webster dans ma bibliothèque des précisions sur les effectifs orchestraux.J. Webster est le musicologue qui argumente sur l' absence de continuo dans les symphonies haydniennes et j' ai déjà retrouvé ceci (concernant les parutions discographiques de C. Hogwood):

https://fr.scribd.com/document/288586265/Haydn-Joseph-the-Symphonies-Volume-1-10
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