La symphonie n° 53 en ré majeur L'Impériale est la seule symphonie de
Joseph Haydn existant sous deux versions différentes, appelées 53 A et 53 B. La symphonie 53 B est la plus ancienne, elle se compose d'un allegro initial, d'un andante, d'un menuetto et d'un finale qui n'est autre que l'ouverture Hob Ia.7 datant de 1777. On peut donc en déduire que la symphonie 53 B est postérieure à 1777 et c'est cette version qui contribua à populariser l'oeuvre notamment en Angleterre où elle triompha. Durant l'incendie qui ravagea Eszterhazà en 1779, il est possible que la symphonie B disparut; de ce fait Haydn reconstitua une nouvelle oeuvre (53 A) dans laquelle il ajouta une introduction adagio et remplaça l'étincelant finale de la version 53 B par un nouveau finale A appelé
cappriccio (1). Deux autres pièces furent également utilisées pour conclure la symphonie, un finale C apocryphe et un finale D qui n'est autre que l'ouverture Hob Ia.4 datée de 1782-4 (2).
L'instrumentation de la symphonie comporte une flûte, deux hautbois, deux cors en ré et en la, un basson (deux dans la version B), quintette à cordes et timbales.
Le premier mouvement débute par une introduction
adagio très majestueuse. A un thème affirmatif clamé par tout l'orchestre, le quintette à cordes répond timidement par le fameux thème qui termine la petite symphonie n° 13 en ré majeur de
Joseph Haydn de 1763 et surtout la célébrissime symphonie Jupiter KV 551 de
Wolfgang Mozart. Le
Vivace qui suit débute assez mystérieusement par un thème
piano chanté par les violoncelles doublés par les cors. L'orchestre au complet s'empare ce thème et après un pont ce même thème est vigoureusement repris à la dominante par les basses avec un nouveau contrechant des violons, épisode qui conduit tout naturellement au second thème. Ce dernier très mélodieux est énoncé par les violons doublés par les hautbois. Le développement est très long (plus de quatre vingt mesures après 100 mesures d'exposition). Il est pratiquement entièrement construit sur le premier thème. Ce dernier passe par tous les pupitres et et est accompagné par le contrechant signalé plus haut. Quand le thème est repris
fortissimo par les basses sous les trémolos des violons, l'effet est vraiment grandiose. Après un courte intervention du second thème le premier thème passe par des modulations très expressives qui amènent très élégamment la réexposition. Cette dernière est considérablement écourtée et compte moins de soixant mesures.
Le
célébrissime andante en la majeur est un thème suivi de cinq variations. Le plan A B A1 B1 A2 A3, alternant variations majeures et mineures est typique des thèmes variés de Haydn. Le thème A serait d'origine française. La variation B, une transposition du thème en la mineur, est exposée par les premiers violons accompagnés par les seconds violons et les altos; elle possède un lyrisme intense et dès la première écoute se grave instantanément dans la mémoire; on comprend alors pourquoi cette musique a pu avoir tant de succès. La variation A1 en la majeur consiste en une délicate broderie des premiers violons sur le thème. Dans la variations B1 en la mineur, les basses (violoncelles, contrebasses et bassons) qui s'emparent du thème donnent à ce dernier un caractère presque romantique. La variation A2 en la majeur est confiée aux vents avec un accompagnement pittoresque de sextolets spiccato des violons. Comme c'est souvent le cas chez Haydn le thème initial revient presque inchangé dans la variation A3 qui fait office de coda.
Le menuetto est remarquable par sa deuxième partie animée par une descente chromatique des vents
pianissimo au dessus d'un accompagnement discret des violons et des violoncelles distincts des contrebasses. L'orchestration très subtile de ce passage lui donne une poésie très prenante digne des menuets des grandes symphonies à venir. Le trio est un laëndler confié principalement à la flûte.
C'est le finale B que l'on joue généralement pour clore la version 53 A de la symphonie. Comme on l'a dit déjà, il s'agit de la
sinfonia HobIa.7 dont on pense qu'elle introduisait un spectacle pour marionnettes. Elle servira avec des modifications comme premier mouvement de la symphonie n° 62 (3). De caractère très italien c'est une pièce symphonique très brillante possédant deux thèmes. Il n'y a pas de reprise de l'exposition comme il se doit pour une sinfonia d'opéra. Le développement est basé sur une version inversée du premier thème en valeurs longues, passant par les modulations les plus variées, il est pratiquement dépourvu de contrepoint comme l'est le mouvement dans son ensemble. En tout état de cause ce finale débridé clot avec brio cette intéressante symphonie.
(1) Peter A. Brown The first Golden Age of the Viennese Symphonies, Indiana University Press, Indianapolis, 2002.
(2) Marc Vignal, Joseph Haydn, Fayard, 1988.
(3)
https://haydn.aforumfree.com/les-symphonies-f1/symphonie-n-62-en-re-majeur-t302.htm