Quand Haydn compose Arianna a Naxos en 1789 ou plus probablement 1790, il a certes cessé depuis 1784 de composer des opéras italiens mais, en tant que maitre de chapelle à Eszterhàza, il occupe dans les faits le poste de Directeur Musical de l’opéra. Il doit dans ce cadre monter, réviser de fond en comble et diriger les opéras (essentiellement italiens) de ses collègues Giovanni Paisiello, Domenico Cimarosa, Antonio Salieri, Giuseppe Sarti, Francesco Bianchi, Pietro Guglielmi, Luigi Caruso, etc…(1). Il y a plusieurs représentations par semaine et ce travail est harrassant. La contrepartie c’est qu’il devient un des meilleurs spécialistes européens de ce répertoire.
L’influence de l’opéra italien et tout particulièrement de l’opéra seria est manifeste dans la cantate pour soprano et accompagnement de piano, Arianna a Naxos. C’est une oeuvre très concentrée, au départ écrite pour voix et clavier mais manifestement pensée pour l’orchestre (nombreux traits typiquement violonistiques dans l’accompagnement), il n’y a pas de récitatif sec mais trois arias dont la première est précédée et suivie par un récitatif accompagné. L’air en si bémol majeur (Largo) Dove sei mio bel tesoro, suscita l’admiration de Rossini. Ariana est partagée entre l’inquiétude et l’espoir et ces états d’âme sont admirablement rendus par la musique. Suit un air en fa majeur (Larghetto) A che morir vorrei d’expression mélancolique et retenue. Mais la colère et le dépit éclatent violemment dans l’air final en fa mineur (Presto) Misera abbandonata, véritable aria di furore d’une extrême concision toute “haydnienne”. En quelques mesures de musique admirable tout est dit et la cantate se termine par un vrai cri de fureur Chi tanto amai s’invola crudel e infedel (Celui que j’aimai s’envole, cruel et déloyal).
Il existe une transcription pour orchestre à cordes de cette cantate. Selon Martin Gester, directeur du Parlement de Musique et interprète de cette magnifique cantate, cette transcription d’auteur inconnu, a été retrouvée dans l’Ospedale dei Mendicanti à Venise.