Joseph Haydn
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Joseph Haydn

(1732-1809)
 
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 Franz SCHUBERT (1797-1828)

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Joachim
Piero1809
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MessageSujet: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeJeu 5 Fév - 2:36

Le sujet sur lequel Piero me demande une précision est celui de la version intégrale  du finale du trio en mi bémol majeur  op.100 de Schubert, telle qu’elle peut être lue dans le manuscrit. Ce manuscrit fait mention d’une reprise de l’exposition, avec une barre de reprise à la 230 ème mesure, ignorée dans les éditions traditionnelles, et de deux passages qui ne figurent pas non plus dans les éditions traditionnelles. Le premier passage coupé va de la mesure 358 à la mesure 408 de l’édition complète et contient une vaste amplification du développement. Le second passage va de la mesure 463 à la mesure 513 de l’édition complète, et contient des passages qui superposent le rythme en croches répétées du second thème à ¢ sur le thème suédois du second mouvement, en alternance avec son merveilleux accompagnement au balancement si caractéristique qui envahit peu à peu tout le finale. Ces passages font actuellement l’objet d’une édition parfaitement révisée chez Bärenreiter, la révision ayant été faite conformément aux principes éditoriaux de la Neue-Schubert-Ausgabe. Trois enregistrements au moins existent actuellement de cette version “complète”, l’un par les Mozartean Players de 1995 chez Harmonia Mundi, l’un par le Trio Altenberg de Vienne enregistré en live en 1996 au Mozarteum de Salzbourg (je possède ces deux enregistrements), et un autre par le Trio Italiano enregistré en 2000 pour Arts Musics. Le pianiste du Trio Altenberg de Vienne, Claus-Christian Schuster, qui se révèle un remarquable musicologue, a écrit une passionnante notice sur ce trio  (au milieu d’une quantité d’autres notices toutes disponibles exclusivement en allemand malheureusement sur le site www.altenbergtrio.at). Heureusement cette notice est traduite en français et en anglais dans le livret du CD en ma possession.

Selon C. Schuster, ce n'est pas avec l'intention d'améliorer son œuvre que Schubert  l’a raccourcie mais plutôt par esprit de conciliation, par complaisance envers ses amis et pour ménager "le Public". Il considère qu’en fait ces coupes et ces remaniements ont le grave l’inconvénient d’obscurcir la forme de ce finale. L’œuvre, la seule que Schubert n'ait pas éditée de son vivant en Autriche, mais en Allemagne, a suivi un parcours assez accidenté :

Schubert la compose en Novembre 1827, en y utilisant des tournures caractéristiques de la chanson populaire suédoise "Se solen sjunker" ("Regarde le soleil qui se couche .. ") comme fondement de son matériau thématique (il avait à cette époque entendu à plusieurs reprises des lieder composés par le chanteur suédois Isaak Albert Berg, alors en tournée en Autriche). Elle est ensuite exécutée le 26 décembre 1827 dans une soirée donnée par le Quatuor Schuppanzigh (Carl Maria von Bocklet, piano ; Ignaz Schuppanzigh, violon; Josef Linke, violoncelle). En février 1828, les éditeurs Schott (Mayence) et Probst (Leipzig) demandent à Schubert (indépendamment l'un de l'autre) de leur confier des œuvres à publier. Sur les dix œuvres que Schubert propose alors, avec le trio en première place, Schott en réclamera huit. Le 26 mars 1828, au "Concert Privé" que donne Schubert au "Wiener Musikverein" pour le premier anniversaire de la mort de Beethoven, le Trio rencontre un grand succès (Carl Maria von Bocklet, piano; Josef Michael Bohrn, violon; Josef Linke, violoncelle). Le 10 avril 1828  Schubert parle dans une lettre adressée à Schott du succès qu'a rencontré le Trio et est d'accord pour lui remettre l'oeuvre. Probst fait alors pression sur Schubert pour obtenir les droits et envoie immédiatement ses honoraires à Schubert. Schott renonçant finalement à se charger du trio, Schubert accepte l'offre de Probst en mai 1828. Dans sa lettre il attire expressément l'attention de Probst sur les coupures qu'il a prévues entre temps et qui semblent avoir été suggérées par Schott, et exige que celui-ci “les observe le plus exactement possible”. Le 18 juillet 1828, Probst accuse réception de l'envoi du manuscrit de la partition et demande à Schubert de lui indiquer un numéro d'opus et quelques noms de dédicataires. Schubert répond alors : “je donne le numéro 100 à cet opus. J'insiste pour que l'édition soit propre et sans fautes, et je l'attends avec une grande impatience. Pas de dédicace à qui que ce soit, sauf à ceux qui trouveront du plaisir à l'écouter.” Le 6 octobre Probst confirme que la gravure et les corrections du Trio sont terminées. Mais Schubert meurt le 19 novembre. L'arrivée à Vienne de la première édition de l'opus 100 par Probst à Leipzig sera annoncée en décembre par Artaria.
Il semble donc que Schott trouvant l’œuvre d’une longueur inhabituelle pour le public ait lui-même effectué des coupures, et que Schubert, après cette surprise douloureuse, cédant à l'insistance de ses amis, ait raccourci le dernier (et le plus long) mouvement.
Il appartient à la fois à tous et à personne de juger du bien-fondé ou de l’inopportunité des coupures effectuées. J’ai obtenu l’autorisation de donner dans un prochain post la traduction française de la notice de C.C. Schuster, qui prend nettement parti pour la version intégrale et étaie son propos d’une analyse un peu technique mais particulièrement intéressante ainsi que de considérations esthétiques sur l'art qui ne peuvent laisser indifférent.  Pour ma part, je dois dire qu’après avoir travaillé et joué la version habituelle dans ma jeunesse, puis très récemment la version complète, il me paraît très difficile de réécouter la version raccourcie sans trouver qu’il y manque effectivement quelque chose.
Le manuscrit a été conservé et c’est ce qui a permis de reconstituer l’œuvre telle qu’elle fut écrite. Je ne sais pas si le manuscrit conservé est l’original envoyé à Probst, ou bien la copie manuscrite que Schubert avait confiée à Karoline Esterhazy née en 1805 et élève de Schubert (à qui il dédiera la Fantaisie à quatre mains en fa mineur).
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeJeu 5 Fév - 15:14

Quelques données supplémentaires :
Le finale sans coupures mais sans faire la reprise dure 15 minutes 17 secondes dans l'enregistrement des Mozartean Players. Cette formation ajoute cette version du finale en "bonus" sur son CD, la version traditionnelle du finale y durant 13'27".
Chez les Altenberg, qui s'engagent beaucoup plus puisqu'ils font la reprise dans un enregistrement de concert, le finale dure 19'30", en jouant à une vitesse conséquente.
C-C Schuster considère que joué ainsi ce mouvement paraît en fait moins long (on n'est pas obligé d'être d'accord) car il devient d'une structure beaucoup plus évidente, il s'agit clairement d'un mouvement de structure sonate à deux thèmes et non d'une forme compliquée de rondo. Le point important est que la coupure des mesures 463 à 513 supprime le passage le plus intéressant de l'œuvre qui superpose le second thème du finale à celui du second mouvement et donne une impression extraordinaire, en approchant de la fin du long voyage que représente l'écoute de ce trio.

Il existe également sur ce finale une fiction de Jean-Marc Geidel, "Manuscrit trouvé dans un grenier" dans un livre appelé "Le voyage inachevé" consacré à Schubert et paru chez L'Harmattan.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeVen 6 Fév - 0:04

Merci Jean Pierre pour cet exposé magistral sur un problème passionnant. J'admire la précision et la rigueur de votre exposé.

Je me permets d'ajouter un point plus prosaïque concernant ce deuxième trio en mi bémol majeur opus 100 que peut-être des colistiers plus jeunes que moi ne connaissent pas.

La célèbre mélodie suédoise, thème principal du second mouvement et qui dans la version originale du finale joue un rôle essentiel, a été popularisée par le film Barry Lindon (1975) de Stanley Kubrick. Grâce à ce film, ce trio, auparavant assez peu connu, a connu un surcroît d'audience. Paradoxalement le premier trio en si bémol, opus 99, cheval de bataille du trio Casals Thibaud Cortot, est relativement peu joué de nos jours.

Bonne soirée
Piero


Dernière édition par Piero1809 le Jeu 4 Fév - 18:53, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeSam 7 Fév - 2:12

Comme je l'avais promis voici de larges extraits de la notice de CC Schuster, pianiste du trio Altenberg. Ses considérations sur l'art en général me parlent réellement. J'ai mis en bleu le passage vraiment "technique".

Il y a une "question de détail", qui a une signification très importante chaque fois que l'on exécute cette oeuvre : quelle est la version authentique du dernier mouvement ? Si, contrairement à l'usage, l'espace réservé à cette notice d'introduction est utilisé pour la discussion de ce problème, cela se justifie, comme je l'espère, par les raisons suivantes : on peut effleurer à cette occasion des questions d'ordre général concernant les rapports entre l'auteur, l'oeuvre et l'interprète, qui ne peuvent être indifférentes ni à l'auditeur, ni à l'exécutant.

Schubert, défendu contre lui-même
On peut considérer le Trio de Schubert en mi bémol majeur comme l'oeuvre la plus monumentale de toute la littérature pour piano en trio, non seulement quant à sa longueur qui atteint véritablement des dimensions symphoniques, mais aussi quant au nombre de lignes musicales superposées et à la richesse des matériaux thématiques et du contenu des idées. Il semble toutefois que le destin de tels monuments soit d'être bien souvent menacé par la destruction ou la déformation. Mais si, dans presque tous les cas comparables, les éléments perturbateurs et les changements sont dus à l'incompréhension des générations suivantes ou à l'adversité des événements historiques, ici, à la racine du mal, c'est l'auteur en personne que nous trouvons ! Il est vrai que le créateur perçu en tant que menace pour sa propre œuvre n'a rien de nouveau - combien de plans ou de projets géniaux n'ont-ils pas été soi-disant "améliorés" jusqu'à en mourir! (Le personnage de Balzac, Maître Frenhofer, dans son roman Le chef d'oeuvre inconnu est vraisemblablement l'exemple le plus typique de ce genre de tragédie). Ici toutefois, la situation est un peu différente : ce n'est pas avec l'intention d'améliorer son oeuvre que Schubert a péché, mais plutôt par esprit de conciliation, par complaisance envers ses amis et pour ménager "le Public". Le fait que ses amis aient pu (avec les meilleures intentions du monde) le conseiller aussi mal n'arrange pas les affaires ; de même, le fait que Schubert, par les manières affables dont il témoigne ici, nous rende l'homme encore plus sympathique, ne nous dédommage que de façon très imparfaite.
Pour comprendre la manière de procéder de Schubert, un élément peut nous être utile : le parcours accidenté lui-même que l'oeuvre a suivi depuis sa composition jusqu'à son édition. Cette oeuvre est en effet la seule que Schubert n'ait pas éditée de son vivant en Autriche.
[……circonstances éditoriales détaillées dans mon précédent post…………]
Derrière l’histoire de la publication de ce trio, il y a certainement une explication qui révèle le sens profond du mot d'esprit souvent cité sur les "oeuvres trop longues pour des auditoires trop courts" de Schubert ! On a en effet tout-à-fait l'impression que Schubert a attribué la coupure surprenante effectuée par Schott à la longueur inhabituelle pour le public de cette œuvre, et qu'après cette surprise douloureuse, cédant à l'insistance de ses amis, il a raccourci le dernier (et le plus long) mouvement, de la manière qu'on sait : la répétition de l'exposition a été supprimée, ainsi que les deux longs épisodes du développement comprenant chacun cinquante mesures ; de cette façon, le mouvement a perdu presque un tiers de sa dimension originelle.
Bien sûr, Schubert aurait dû savoir qu'on ne peut transformer une cathédrale en église de village en détruisant l'abside. Or, c'est justement ce fait qui sert d'argument à de nombreux défenseurs de la mutilation schubertienne : si le plan et le projet de l'ensemble sont reconnaissables dans la version raccourcie, l'intervention n'a causé aucun dommage à l'œuvre, mais lui a donné plus de rigueur.
Or, il suffit de se familiariser de façon un peu plus approfondie avec la construction de l'oeuvre, pour se rendre compte que les coupures conseillées à Schubert ont eu une influence fatale sur l'ensemble. C'est d'abord à cause de ces modifications qu'on a l'impression de "longueurs", parce que les proportions et le dénouement du mouvement qui couronne et achève l'oeuvre sont fortement dérangés. Souvenons-nous du célèbre Groupe du Laocoon au Vatican : combien le message et l'effet produits par cette oeuvre n'ont-ils pas été altérés par les ajouts hypothétiques de Michel-Ange et de Montorsoli, jusqu'à ce qu'on retrouve au XXe siècle des fragments de l'original ! Dans ce dernier cas, et par la force des choses, il était presque inévitable qu'une erreur apparaisse. Quant aux retouches proposées par Schubert pour obtenir soi-disant plus de rigueur, elles donnent l'impression d'un obscurcissement systématique de la signification de l'oeuvre.
La première intervention, à savoir la suppression de la reprise, a pour effet que la clarté de la forme prise dans son ensemble se perd. Presque tous les auditeurs de la version raccourcie, ne se doutant de rien, supposent qu'il s'agit dans ce mouvement d'une forme compliquée de rondo de sonate ; en réalité, il s'agit bel et bien du mouvement principal d'une sonate "classique".
La seconde intervention (suppression des mesures 358 à 407) rend la structure du développement méconnaissable ainsi que la perspective architecturale la plus évidente de l'oeuvre entière. L'accord perçant de septième diminuée qui par deux fois déjà s'est opposé à l'entrée du groupe triomphant d'accords finaux, cet accord qui, dans l'océan du développement, devient le catalyseur de la musique elle-même, n'est compréhensible que si l'on peut saisir comment - dans l’intensification et l'expansion dramatique du principe appliqué à l'endroit correspondant du premier mouvement -,saisir comment les quatre notes de l'accord de septième diminuée (sur si majeur) sont transformées l'une après l'autre en notes "autonomes" (si mineur - ré mineur - fa mineur - la bémol majeur). Couper, c'est aussi faire disparaître la seconde moitié de ce grand arc, et l'on passe d'un moment à l'autre à cet instant où le cri perçant de cet accord final qui nous poursuit de façon cauchemardesque est enfin remplacé par un accord majeur affirmatif, ceci lorsqu'à la n de ce développement de la bémol majeur est atteint.
Mais le dernier mauvais tour, au sens le pire du mot, est de loin le plus grave : la suppression des mesures 463 à 514, fin du développement sape la position du si mineur qui erre de façon menaçante dans toute l'oeuvre, ce si mineur étant comme la contre-partie de la tonalité légère de mi bémol majeur, celle de l'oeuvre. En supprimant ce passage véritablement mystique, dans lequel tous les protagonistes thématiques se rencontrent dans la lumière blafarde de si mineur, l'un des aspects fondamentaux de l'oeuvre devient un détail peu compréhensible - et les points de jonction des deux premiers mouvements qui tournent autour de si majeur n'ont plus aucun contrepoids ; toute la ligne musicale se perd pour ainsi dire dans le vide. Comme si dans un drame on avait enlevé à celui qui tient les ficelles dans l'obscurité, et qui est à l'origine des événements, le monologue crucial dans lequel il explique quels sont ses raisons d'agir.
Par bonheur, le manuscrit de Schubert avec le texte original complet nous a été conservé (il est malheureusement devenu propriété privée et difficile d'accès), de sorte qu'à cet égard au moins, nous pouvons protéger l'auteur contre lui-même, même si nous risquons de lui porter involontairement préjudice. Tandis que la Nouvelle Edition Schubert, comme d'ailleurs aussi l'édition qui l'a précédée, offre comme c'est l'usage académique, les deux variantes côte à côte, les Éditions Henle ont choisi pour l'édition du texte original ("Urtext") la seule variante de la première édition - alors que pour presque tous les autres points cette édition est plus rigoureuse. L'éditrice justifie ceci dans la préface par un paragraphe dont la superficialité est illustrée par une série d'inexactitudes concrètes qui ne sont pas du tout caractéristiques de son style ; elle déclare simplement que les passages supprimés ne sont que du "matériel appartenant aux mesures passées", et de même, pour la citation du second mouvement "qui de toute façon apparaît deux fois dans le finale." Si l'on voulait accepter la plausibilité d'une telle argumentation esthétique, on pourrait dans les cas de doute rayer sans scrupules une bonne quantité de l'ensemble de notre héritage culturel. Du Pentateuque aux Colonnades vaticanes du Bernin, on pourrait trouver partout l'occasion de faire de telles coupures.
La question demeure toutefois (et on ne peut y répondre) : comment se fait-il que le génie qui a pu inventer toutes ces merveilles ait été en même temps aussi aveugle pour la vulnérabilité de ses propres oeuvres ? Nous voici - de nouveau désemparés et pour cette raison si désespérément bavards ! - devant l'éternel mystère de la création qui inclut bien sûr le territoire des formes consciemment choisies, mais les dépasse tellement que pour le créateur aussi, la création doit rester en définitive une énigme.
Il est beaucoup plus facile de répondre à la question de savoir pourquoi, depuis plus de cent ans que le texte original -maintenant édité- était accessible, la version complète ne s'est pas imposée. À côté de cette force si difficile à combattre (fausse, comme toujours) qu'est la "Tradition", derrière laquelle Gustave Mahler flairait un beau synonyme pour commodité et négligence, c'est certainement la préférence compréhensible des interprètes et du public pour la facilité et la brièveté qui leur a fait préférer la version courte. Seule une confrontation des deux versions peut démontrer que la brièveté et la clarté ne vont pas forcément de pair, et que la coutume et l'usage dans ce cas perpétuent une tragique erreur.

Claus-Christian Schuster
traduction M.C. Moonen-Dufourcq
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeSam 7 Fév - 11:09

Ce texte est vraiment passionnant. Merci Jean Pierre.
La suppression de deux fois cinquante mesures dans le développement est vraiment une perte irréparable. On peut cependant comprendre Schubert qui a pensé que les temps n'étaient pas mûrs pour accueillir un tel finale et qui, à l'âge de trente ans, pouvait se dire qu'il se rattraperait par la suite.

Par contre j'avoue de pas être un partisan de la reprise systématique de l'exposition d'une structure sonate surtout dans le cas de la musique romantique et post-romantique. Jouer la reprise dans le premier mouvement de la 6ème symphonie de Mahler alourdit considérablement ce mouvement et l'interrompt dans sa terrible et fatale progression dramatique.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMar 10 Fév - 11:23

Au risque de me répéter, ce texte me plait beaucoup, non seulement par son contenu spécifique mais aussi par ses nombreuses références à l'art en général: littérature avec Balzac, sculpture avec le groupe du Laocoon, architecture avec l'abside d'une cathédrale. Il pose le problème toujours actuel de la restauration de l'oeuvre d'art et des limites d'une intervention extérieure, y compris par l'auteur de l'oeuvre.

Lorsque l'intervention ultérieure entraîne un affadissement ou une édulcoration de l'oeuvre d'art, il convient d'être vigilant! Les exemples sont nombreux: symphonies de Schumann réorchestrées par Mahler, Boris Godounov, revu par Rimsky-Korsakof, symphonie n°96 de Haydn corrigée par les romantiques etc...
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMer 11 Fév - 18:43

Tout à fait d'accord, les références de ce texte posent le problème de l'œuvre d'art avec beaucoup d'acuité (cf "L'œuvre" de Zola); il est finalement assez rare de voir des interprètes se pencher sur la question des enjeux de leur art.
On peut ajouter que bien des compositeurs ont détruit plusieurs de leurs œuvres sans qu'on puisse être sûr qu'ils ne nous aient pas privé de véritables chefs d'œuvre, pour ne rien dire des destructions opérées par leurs proches (les 5 romances pour violoncelle de Schumann composées en 1853 furent détruites par Clara !).


Dernière édition par JPS1827 le Dim 15 Fév - 2:39, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeDim 15 Fév - 2:27

Giuseppe1732 a écrit:
…j'avoue de pas être un partisan de la reprise systématique de l'exposition d'une structure sonate surtout dans le cas de la musique romantique et post-romantique. Jouer la reprise dans le premier mouvement de la 6ème symphonie de Mahler alourdit considérablement ce mouvement et l'interrompt dans sa terrible et fatale progression dramatique.

Le problème de la reprise de l'exposition me paraît un problème complexe qui a dû évoluer avec le temps. A l'époque où il n'existait pas d'enregistrements, la reprise de l'exposition, héritée de celle des deux sections des anciennes sonates (cf Domenico Scarlatti) avait, entre autres, le but de bien faire assimiler au public le matériel thématique. Je pense que cette reprise de l'exposition est à peu près constamment notée chez Mozart et Haydn. Haydn note parfois également une reprise du développement et de la réexposition.
Beethoven sera moins constant sur ce sujet, puisqu'il note une reprise le plus souvent, mais l'omet parfois dans ses mouvements de structure sonate (1er mouvement de la sonate op.54, 1er mouvement de la sonate op.57 Appassionata, 1er mouvements de la sonate op. 90, de la sonate op.110., 1er mouvement du 11ème quatuor, et j'en oublie sûrement pas mal…), apparemment quand cela correspond effectivement à un élan que rien ne doit arrêter (cas des deux œuvres en fa mineur que sont l'Appassionata et le quatuor Serioso). Quand il note les reprises, elles sont "carrées" si je puis dire, en ce sens qu'il n'y a pas de texte supplémentaire à jouer pour ramener le début de l'œuvre.
Schubert suscite plus de controverses dans la mesure où il note parfois des mesures supplémentaires qu'on perd si on ne fait pas la reprise, alors que cette reprise s'applique à une exposition déjà très longue ! Le cas le plus caricatural est celui de la sonate D.960 en si bémol majeur. Si on ne fait pas la reprise on perd neuf mesures étranges et mystérieuses, dont les sept premières ne sont entendues sous aucune forme, même allusive, dans le reste du mouvement. Alors que faire ?
Je pense que ça dépend de l'endroit où l'œuvre est jouée, du public et surtout de l'exécutant. Richter avait démontré à des amis qu'on pouvait jouer ce mouvement en faisant la reprise, et plus lentement, et que "ça tenait" toujours. Mais c'était Richter !
Dans le trio qui nous occupe, la reprise dans le finale (alors qu'on a déjà fait celle du premier mouvement et les reprises habituellement prescrites dans le troisième) ne peut se justifier que par une formation capable d'une hauteur de vue peu commune, capable de donner à l'œuvre une véritable dimension de voyage initiatique.
Ultérieurement, Mendelssohn, Schumann et même Chopin dans ses Sonates pour piano, garderont l'habitude de noter la reprise (Chopin montrera son refus de tout académisme plutôt dans les enchaînements développement-réexposition, supprimant la réexposition du premier thème dans sa troisième sonate op.58 par exemple). Un certain nombre de reprises me semblent avoir été notées par traditionalisme au 19ème siècle. Par exemple je trouve que la reprise convient mal à l'exposition d'une œuvre aussi extraordinaire que le 3ème quatuor de Schumann (mais cela n'engage que moi, bien sûr).
Pour finir, je dirai que je suis d'accord avec Giuseppe : actuellement, sachant que les enregistrements permettent d'écouter les œuvres assez souvent, et donc de les assimiler plus facilement, et que l'époque n'est pas très favorable à l'allongement des durées, mieux vaut s'abstenir de faire la reprise si on n'a pas un sens précis à lui donner, en sachant que parfois un génie nous subjuguera en la faisant.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeDim 15 Fév - 23:25

JPS1827 a écrit:
... actuellement, sachant que les enregistrements permettent d'écouter les œuvres assez souvent, et donc de les assimiler plus facilement, et que l'époque n'est pas très favorable à l'allongement des durées, mieux vaut s'abstenir de faire la reprise si on n'a pas un sens précis à lui donner, en sachant que parfois un génie nous subjuguera en la faisant.
C'est exactement ce que je pensais. Merci Jean Pierre de l'avoir exprimé avec les mots les plus justes.

Je viens de consulter la partition de la sonate en si bémol D 960 de Schubert. Effectivement les mesures supplémentaires mises en jeu dans la reprise sont essentielles et dans ce cas la reprise me semble logique.
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MessageSujet: 15ème quatuor en sol majeur   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMer 15 Avr - 21:46

L'audition du 15ème quatuor en sol majeur opus 161 de Schubert avait provoqué une de mes plus grandes émotions musicales. Harry Halbreich, un grand musicologue, l'avait désigné comme un des plus grands quatuors de tous les temps. En toute modestie je suis pleinement d'accord.

Le colossal premier mouvement, Molto Moderato, est fantastique, on a souvent dit que Schubert avait subi l'influence de Beethoven. C'est faux. Il n'y a rien de commun entre ce quatuor composé en 1827 et les derniers de Beethoven (12ème au 17ème, il faut comparer des choses comparables). Par contre tout rapproche ce 1er mouvement avec le mouvement correspondant de la 7ème symphonie en mi majeur d'Anton Bruckner.
Le mouvement commence par un thème inoubliable au premier violon accompagné par les trémolos pianissimo des autres cordes, le thème (misterioso) passe dans les profondeurs du violoncelle tandis que les tremolos toujours pianissimo s'élèvent vers les hauteurs les plus éthérées. Remplacez le premier violon par un cor et vous aurez Bruckner, le violoncelle par une clarinette basse et vous aurez un passage de la 6ème symphonie en la mineur de Mahler! Je passe sur la suite pour dire simplement qu'on en a le souffle coupé jusqu'à la fin du morceau (450 mesures plus loin).
On a souvent glosé sur les divines longueurs de Schubert. Selon certains elles auraient un effet soporifique. Ici, on ne s'endort pas pour se réveiller au Paradis, on est déja au Paradis (ou bien en enfer car il y a des passages tourmentés ou désespérés dans ce quatuor).

Une particularité de ce chef-d'oeuvre réside dans son instabilité tonale, la première mesure est en sol majeur mais la troisième est en sol mineur. L'alternance majeur mineur subsistera pendant la totalité des 1er et 4ème mouvements et peut être considérée comme une technique compositionnelle au service de l'expression musicale. Finalement le quatrième mouvement qui débute en sol mineur avec une course désespérée vers l'abîme, se terminera en sol majeur sur une note apaisée.

Piero
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeDim 19 Avr - 14:40

Ce quatuor est aussi mon préféré parmi ceux de Schubert. J'ai pour ma part toujours trouvé une certaine parenté entre l'appel que constitue le premier thème du premier mouvement et le tout début du prélude de Lohengrin (d'un visage très différent du fait de l'absence de trémolos bien sûr). Le finale est un mouvement tout à fait remarquable et très ambigu effectivement, ne serait-ce que par la ritournelle d'apparence inoffensive qui conclut l'exposition, mais je n'en ai malheureusement jamais entendu d'interprétation qui me satisfasse, le caractère d'inquiétante et tournoyante tarentelle (cf le finale de la sonate D958 en ut mineur) restant absent de celles dont je dispose (Melos, Amadeus, Berg, Sine Nomine).
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeDim 19 Avr - 19:39

Une seule version du quinzième quatuor en sol majeur de Schubert m'a enthousiasmé: celle du quatuor Hongrois sur microsillon que j'ai malheureusement perdue. Les Hongrois interprétaient le premier mouvement "molto moderato" dans un tempo justement pas trop lent et avec une violence inouie dans certains passages triple fortissimo. Eux seuls donnaient au quatrième mouvement son caractère tellement fantastique ainsi qu'une puissance équilibrant le premier mouvement.

Les Amadeus et même le quatuor de Budapest (que j'adore dans Beethoven) m'ont déçu. Ils prennent le premier mouvement trop lentement à mon goût.
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MessageSujet: sonate en fa mineur D 625   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeLun 6 Juil - 10:18

Composée en 1818, la 11ème sonate en fa mineur D 625 de Franz Schuber est restée inachevée. Les deux mouvements extrêmes comportent l'exposition et le développement. Wilhelm Kempf* a écrit la réexposition ce qui ne lui a posé aucun problème. Le mouvement lent semble manquer.

Allegro en fa mineur. Ce magnifique mouvement est construit sur un seul admirable thème qui, subtilement modifié par d'audacieuses modulations, va subir des changements d'éclairage qui le rendent tour à tour passionné, méditatif, révolté, et enfin grandiose quand, dans la fin du développement, le thème initial est repris par la main droite dans l'aigu tandis que les basses du piano font retentir un impressionnant grondement.

Scherzo. Il est en mi majeur, tonalité très éloignée de la tonalité principale. Ce scherzo frappe par sa rudesse et ses nombreuses dissonances. Le trio est un merveilleux moment musical, on y admire la subtilité de l'harmonie et on ne peut s'empêcher de citer Gabriel Fauré.

Finale Allegro en fa mineur. C'est sans aucun doute le morceau le plus génial de cette sonate. De nombreux commentateurs ont évoqué la ressemblance de ce mouvement avec le terrible presto finale de la 2ème sonate en si bémol mineur de Frédéric Chopin dite Funèbre, "le finale avec ses unissons menaçants rappelle une ébauche pour le finale de la sonate de Chopin" selon W. Kempf! Les ambiguités tonales et les chromatismes qui parcourent ce mouvement sont prophétiques et montrent à l'évidence le côté romantique de Schubert.

Etant donné le degré avancé d'achèvement de cette sonate on peut s'étonner que Schubert ne l'ait pas terminée! Peut-être que Schubert interrompit la composition de ce chef d'oeuvre, pensant que les temps n'étaient pas murs pour l'accueillir. Peut-être songeait-il à en reprendre la composition ultérieurement.

*Wilhelm Kempf, Intégrale des sonates de F.Schubert, LP Deutsche Grammophon.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Schubert
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMar 7 Juil - 9:54

Merci beaucoup d'attirer notre attention sur cette sonate belle et étrange, que je n'avais jamais écoutée. Avec la partition sous les yeux, on est confondu par l'habileté avec laquelle Kempff a écrit la transition de la fin du développement vers la réexposition du premier mouvement, qu'il termine sobrement toutefois, sans développer de coda.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeJeu 4 Fév - 11:28

La symphonie n° 8 en si mineur Inachevée de Franz Schubert est tellement connue qu'on en parle finalement rarement. Quand je l'entendis, il y a fort longtemps, pour la première fois, je fus bouleversé. Ayant mis les symphonies de Beethoven au pinacle, je me rendis compte lors de cette première audition de l'Inachevée qu'avec des moyens très différents Schubert avait crée un style symphonique, très personnel et complémentaire de celui de Beethoven.

J'ai écouté récemment avec attention cette symphonie et je me suis extasié de nouveau. Quelle originalité, quelle nouveauté dans cette oeuvre et dans son premier mouvement Allegro moderato 3/4 en particulier! Le premier thème pianissimo aux contrebasses s'abimant dans les profondeurs est très mystérieux et le second thème aux violoncelles est une splendeur, un des plus beaux de Schubert en vérité. Lorsque dans le dévelopement le premier thème est repris fortissimo par les trombones, l'effet est grandiose. On ne dira jamais assez combien Schubert utilise les trombones de façon merveilleuse dans les symphonies n° 8 et 9 et dans sa géniale messe en mi bémol majeur composée en 1828. De ce point de vue il est très en avance sur Beethoven.

Le sublime deuxième mouvement de la 8ème se déroule dans un tempo Andante con moto 3/8 un peu plus lent que le premier. Le thème principal crée une ambiance de rêve interrompue par un épisode mineur d'une grande violence. Le calme revient et l'oeuvre s'achève par un pianissimo de tout l'orchestre (trombones compris)**. Il n'y a pas de rupture entre les deux mouvements (rythmes et tempos semblables) qui forment un ensemble complet, une sorte de poème symphonique auquel il n'y a plus rien à ajouter, ni scherzo, ni finale* mais peut-être simplement un titre.

* Il existe cependant des esquisses pour ces deux mouvements.
**On n'insistera jamais assez sur l'audace de l'orchestration de cette symphonie
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMar 23 Fév - 13:15

Piero1809 a écrit:
Il n'y a pas de rupture entre les deux mouvements (rythmes et tempos semblables) qui forment un ensemble complet, une sorte de poème symphonique auquel il n'y a plus rien à ajouter, ni scherzo, ni finale* mais peut-être simplement un titre.

* Il existe cependant des esquisses pour ces deux mouvements.
**On n'insistera jamais assez sur l'audace de l'orchestration de cette symphonie

Il existe une intégrale "complète" des symphonies de Schubert, en 6 CD chez Philips, interprétée par l'Academie of St Martin in the Fiels, dirigée par Neuville Marriner.

Je dis "complète" car, outre les symphonies 1 à 6 et 9 déjà bien connues, l'enregistrement propose la 7ème en mi majeur, la 8ème complétée par les scherzo et Finale, ainsi que la 10ème et autres mouvements de symphonie inachevées.

Je trouve, comme nous le suggère si justement Piero, que les mouvements manquants de l'Inachevée n'apportent rien de plus à cette symphonie qui, par les deux mouvements connus, se suffit largement à elle même.

La véritable découverte est cette 7ème symphonie qui se trouve être une "inachevée" d'un autre genre : en effet, les quatre mouvements sont complets, mais seules les 110 premières mesures sont orchestrées, soit l'introduction et le début de l'allegro. Le reste est "noté sans la moindre lacune jusqu'à la dernière note du finale, et ce non seulement pour les parties mélodiques mais souvent aussi pour les voix importantes au point de vue harmonique et rythmique" (1) Pour l'achèvement de la symphonie, il suffit donc de compléter le cadre fourni par Schubert en suivant ses indications sur les instruments (à noter que Schubert prévoit pour la première fois dans une symphonie l'utilisation de trois trombones).

Le premier mouvement se compose d'une introduction en mi mineur suivi d'un allegro en mi majeur. L'introduction est une sorte de marche où clarinettes et bassons se font particulièrement entendre. Suit l'allegro dont le premier thème est vif et joyeux, et le deuxième tendre et lyrique.

Le deuxième mouvement est un andante en la majeur de forme lied typiquement schubertien. D'après Brigitte Massin, cet andante entièrement réalisé par Schubert lui-même serait devenu une des pages les plus célèbres du compositeur, tant il est personnel et rempli de grâce avec ses passages d'un groupe d'instruments à un autre.

Le troisième mouvement est un scherzo en ut majeur avec, comme trio, un laendler en la majeur.

Le quatrième mouvement, finale, est un allegro giusto en mi majeur assez proche du premier mouvement.

Cette symphonie, quelle que soit son orchestrateur (Weingartner ou plus récemment Brian Newbould) est à mon avis un chef d'oeuvre au moins équivalent aux symphonies précédentes y compris la 6ème. Elle devrait être plus souvent interprétée et enregistrée.

(1) Weingartner, qui a réalisé une orchestration de la symphonie en 1934.


Terminée, la 10ème symphonie en ré majeur aurait été à n'en pas douter une des plus belles oeuvres de Schubert. Il l'a commencée trois ou quatre mois avant sa mort, au cours du 2ème semestre 1828 et n'a pas pu la terminer. Il nous reste les esquisses pianistiques de trois mouvements, le deuxième mouvement, un merveilleux andante en si mineur étant le plus complet. La réalisation de Brian Newbould qui a orchestré comme il le pouvait les trois mouvements donne une bonne idée de ce qu'aurait été cette oeuvre magistrale.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeJeu 25 Fév - 10:10

Merci Joachim de nous parler de cette symphonie n° 7 en mi majeur dont toutes les notes comme tu l'as dit sont de Franz Schubert de la première à la dernière. Je ne connais pas cette oeuvre et m'empresse d'acquérir le CD que tu recommandes. La 7 ème symphonie devrait être jouée bien plus souvent!

Par contre la symphonie n° 10 pose problème. Chaque fois que je l'entends, je suis enthousiasmé par quelques phrases musicales admirables (les deux thèmes du premier mouvement) mais je suis terriblement déçu par l'absence de développement de ces idées. Le second mouvement est effectivement le plus accompli des quatre et me donne l'image d'une morne plaine grise et glacée. Le curieux rondo final est très atypique et rappelle qu'à la veille de sa mort, Franz Schubert avait pris quelques leçons de contrepoint si bien que ce rondo apparaît comme un exercice dans lequel Franz met en application ses nouvelles connaissances.

Une inspiration géniale tempérée par l'acquisition de techniques nouvelles, aurait présidé à la naissance de nouveaux chefs-d'oeuvres si Franz Schubert avait surmonté sa maladie.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMer 17 Mar - 23:29

Les quatre impromptus opus 90 D 899 furent composés en 1827 par Franz Schubert. De forme très libre, ils se différencient nettement des formes classiques et plus que tout autre oeuvre de Schubert annoncent le romantisme. Par leur inspiration géniale et leur concision extrême, ils comptent parmi les chefs-d'oeuvre pianistiques de leur auteur.

L'impromptu n° 1 en ut mineur expose trois thèmes admirables, le premier en ut mineur est tragique, le second en la bémol débute très doucement puis prend du volume pour devenir une marche épique, le troisième très gracieux offre un instant de détente.

L'impromptu n° 2 en mi bémol majeur déroule ses petites notes agiles sur un rythme de valse qui évoque fortement Chopin. L'intermède mineur central d'une grande violence me fait encore plus penser au compositeur polonais.

L'impromptu n° 3 en sol bémol majeur est peut-être le plus sublime de tous. Une admirable mélodie est exposée au dessus d'un accompagnement d'une grande richesse; d'une longueur remarquable, la ligne mélodique ne laisse pas l'auditeur captivé reprendre son souffle. Les basses du piano qui de temps en temps grondent n'arrivent pas à troubler la sérénité du chant qui se déroule dans un pianissimo presque continu.

L'impromptu n° 4 en la bémol majeur débute réellement en la bémol mineur. Les arpèges descendants fluides qui courent tout au long du morceau évoquent une source fraîche. La partie centrale en ut# mineur très dramatique contraste avec l'insouciance du début.

Qui souhaite parler maintenant de la deuxième série d'impromptus de Schubert l'opus 142 D 935?


Dernière édition par Piero1809 le Mar 1 Mar - 15:10, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeSam 20 Mar - 17:41

Pour cet opus 90, seuls les deux premiers impromptus furent édités par Haslinger en décembre 1827. Les deux autres parurent en 1857, avec curieusement, une transposition en sol majeur du 3ème (et une mesure à 2/2 au lieu de 4/2). Je possède une très vieille édition de cet impromptu dans la tonalité de sol majeur, et le déchiffrage en est intéressant et étonnant, car l'atmosphère du morceau en est radicalement changée alors qu'il n'y gagne rien en facilité d'exécution, contrairement à ce qu'avait pensé Haslinger (seule la lecture est effectivement plus facile).
Je reviens bientôt au sujet de la seconde série d'impromptus, moins joués dans l'ensemble, mais qui soulèvent des problèmes très intéressants sur le plan de la forme.


Dernière édition par JPS1827 le Dim 21 Mar - 2:53, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeDim 21 Mar - 2:32

La seconde série d'Impromptus date également de novembre-décembre 1827, et ne sera éditée qu'en 1838 par Diabelli sous le numéro d'op. 142, donc dix ans après la mort de Schubert. Schubert mentionne qu'ils peuvent être joués tous ensemble ou bien séparément, ce dont Brigitte Massin tire parti pour réfuter une opinion de Robert Schumann, reprise par Alfred Einstein, selon laquelle ces 4 impromptus seraient les quatre mouvements d'une sonate pour piano. L'argumentaire ne me paraît pas pertinent. Il me semble au contraire que Schubert laisse entendre qu'on peut considérer ces impromptus soit comme un tout (une sonate ?), soit comme des pièces séparées, ce qui leur donne alors un éclairage différent. Les tonalités employées sont celles qu'on pourrait rencontrer dans une sonate en fa mineur : fa mineur pour le premier, la bémol majeur (relatif majeur de fa mineur) pour le second qui ferait office de menuet, si bémol majeur (sous-dominante de fa mineur) pour le troisième qui ferait office de mouvement lent varié, et fa mineur enfin pour le quatrième. Je les ai joués comme une sonate il y a longtemps, et je pense que je privilégierais l'approche séparée aujourd'hui, ayant une prédilection pour l'association du premier et du quatrième joués à la suite, comme affirmation d'une suite d'atmosphères schubertiennes en fa mineur, bien éloignées des atmosphères beethovéniennes de la même tonalité (sonate op.57 Appassionata, quatuor op. 95 Serioso).
Le premier des quatre impromptus nous fait entrer d'emblée dans le monde dépressif de l'errance et de la solitude qui était celui du Voyage d'Hiver composé quelques mois auparavant. Un premier thème en notes pointées s'enfonce inexorablement dans la profondeur de la nuit, dont va émerger une sorte de promenade en doubles croches, qui amène bientôt un passage comportant plusieurs fois la même figure de croches répétées suivies d'un arpège ascendant, transition qui mène au lumineux deuxième thème en la bémol majeur, répété trois fois avant un brusque assombrissement vers la bémol mineur. Ce troisième thème (ou seconde partie d'un grand deuxième thème si on veut coller à une forme sonate) est la partie la plus extraordinaire du morceau. Outre un moyen pianistique rarement utilisé auparavant, la main gauche jouant de courts fragments tour à tour dans le grave et dans l'aigu sur un merveilleux accompagnement pianissimo de la main droite dans le médium, on y trouve une atmosphère d'une plasticité confondante, évoquant d'abord un ineffable et lourd regret, puis un réveil plein d'espoir, et enfin une calme consolation, un adieu à quelque chose qui n'adviendra plus jamais, avant la réexposition. La forme est une forme sonate sans développement, le deuxième thème étant en fa majeur puis fa mineur à la réexposition. La reprise de l'exposition quand elle est faite allonge encore le morceau et lui donne une véritable dimension de voyage initiatique.
Le second impromptu revêt la forme habituelle d'un menuet avec trio. Son thème charmant et bucolique en fait une sorte de quintessence de la tendresse schubertienne, avec un soupçon de nostalgie, ce qui le rend bien difficile à jouer après les profondeurs du précédent. Le trio gagne a être joué legato en chantant les triolets comme un magnifique ornement mélodique sans la moindre velléité de virtuosité.
Le troisième, dit impromptu varié, utilise le thème de Rosamonde, employé également dans le second mouvement du treizième quatuor. Son rythme dactylique en est une signature schubertienne, et malgré sa coupe carrée, il est d'une fraîcheur aimable qui marque un pas de plus dans une progression vers la lumière et l'optimisme depuis le premier impromptu. La première variation mouvante est d'une écriture particulièrement délicate avec les syncopes de la main gauche qui répondent au rythme pointé de la mélodie sur fond de doubles croches ininterrompues. La seconde a quelque chose de gai et d'entreprenant. La troisième, qui passe en si bémol mineur, est la plus belle avec sa cantilène en accords à la main droite sur un accompagnement en accords haletants d'où émerge un motif mélodique confiée au pouce gauche. La quatrième est une transition vers le bouquet final. Cette cinquième variation est une sorte d'amplification de la seconde (même rythme syncopé de la main gauche, même argument mélodique à droite développé cette fois en rapides sextolets, d'une virtuosité primesautière, n'offrant d'ailleurs pas de réelle difficulté pianistique). A la fin tout s'arrête, le thème reprend, concentré et étouffé cette fois, comme un choral, en une fin évasive.
Le quatrième impromptu, le plus difficile des huit sur le plan pianistique, commence sur un rythme piétinant à 3/8, évoquant quelque danse populaire, hérissé d'appoggiatures. La deuxième partie de ce premier thème se termine sur d'étonnantes gammes très rapides dont émerge à nouveau le premier thème. Ce scherzando est ambigu, fait du sur place dans une atmosphère qui ne demande qu'à devenir orageuse. Puis survient un second thème exposé en la bémol majeur, en degrés conjoints à la main droite, sur un appel cuivré de la main gauche, qui va être répété plusieurs fois en majeur puis en mineur selon un procédé expressif fréquent chez Schubert. De ce passage naît une sorte de valse d'abord conciliante, puis de plus en plus affirmée, qui bientôt fait place à de grandes gammes des deux mains à l'unisson, qui vont à leur tour se morceler en fragments bientôt interrogatifs se terminant sur des accords scandés par le petit rythme de valse à la main gauche, qui prend une couleur inquiétante. Puis d'un do répété surgit la réexposition jusqu'à une rageuse coda finale, dernier sursaut de révolte du cycle. Je cite à ce sujet la belle phrase de Brigitte Massin : "un secret mystérieux se cache ainsi avec pudeur sous le couvert d'un thème populaire… c'est bien de dernier mot de ces Impromptus".


Si on veut jouer au jeu des comparaisons musicales, on peut rapprocher de ce dernier impromptu la magnifique et également orageuse Forlane qui clôt les Quelques Danses pour piano d'Ernest Chausson, ensemble de quatre (encore) œuvres peu connues composées en 1896 ou 97 (Dédicace, Sarabande, Pavane, Forlane), que j'ai beaucoup jouées et que j'aime particulièrement.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeVen 26 Mar - 11:05

Merci Jean Pierre pour cette magistrale analyse des impromptus opus 142.

J'ai beaucoup aimé cette discussion que vous initiez sur le genre musical auquel appartiennent ces oeuvres. Grande sonate ou pièces indépendantes liées entre elles par un fil tenu? Vous présentez avec beaucoup d'honnêteté les arguments pour ou contre les deux propositions. A l'auditeur de faire son choix à l'écoute de ces chefs-d'oeuvre.

Pour ma part j'avoue que je n'avais jamais pensé à une sonate tant chacun de ces morceaux avait une forte individualité mais maintenant à la réflexion j'ai plutôt tendance à penser qu'il y a une grande unité dans cet ensemble, unité conférée non seulement par la tonalité mais aussi par un état d'esprit.

A ce compte l'opus 90 possède aussi une certaine unité:
le n°1 en ut mineur fonctionne bien comme l'allegro d'une structure sonate sans développement.
le n°2 en mi bémol majeur est un scherzo.
le n°3 en sol bémol majeur (relatif majeur de mi bémol mineur) est le mouvement lent.
le n°4 en la bémol majeur serait un deuxième scherzo
le n°5 n'a jamais été composé!

Les Klavierstück opus posthume apportent-ils quelque chose de plus au débat sur le genre musical et la forme des impromptus de Schubert?
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeJeu 8 Avr - 21:15

A ma grande honte, il y a pas mal de temps que j'avais écouté les quatuors à cordes.

Je me suis donc repassé l'intégrale des 15 quatuors (plus le mouvement D 103) par le Melos Quartett, chez Deutsche Gramophon.

Interprétation remarquable des Melos, qui nous fait écouter non seulement les célèbres Rosamunde et la Jeune Fille et la Mort et le D 887 en sol majeur, mais également la série des quatuors de jeunesse qui sont loin d'être négligeables. Je pense en particulier au n° 7 D 94, peu connu et qui est magnifique lui aussi.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeMar 4 Mai - 1:25

Le 8ème D112 en si bémol majeur aussi est passionnant, le 1er mouvement en aurait été rédigé en 4 heures (!). Le mouvement lent est du pur Schubert. Le 3ème mouvement est à la limite entre un landler et un menuet, et ressemble a du Haydn, comme d'ailleurs le finale.
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeSam 15 Mai - 9:16

J'écoute en ce moment le quatuor en ut mineur n° 12 D708 par le quatuor Juilliard. Un allegro complet? et un fragment d'andante.

Après une exposition relativement vaste avec une première idée passionnée, hallucinée qui va revenir sous diverses formes par la suite et un magnifique second thème qui lui est un épisode, le développement basé sur une nouvelle idée musicale semble étonnamment court et s'enchaîne directement sur le deuxième thème lors de la reexposition. Tel quel ce merveilleux mouvement a un goût d'inachevé. Sublimes sont ces glissements chromatiques à la fin de l'exposition de ce morceau. Quelle frustration quand la musique s'arrête dans l'andante inachevé!
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MessageSujet: Re: Franz SCHUBERT (1797-1828)   Franz SCHUBERT (1797-1828) Icon_minitimeSam 15 Mai - 11:42

Joachim a écrit:
Piero1809 a écrit:
Il n'y a pas de rupture entre les deux mouvements (rythmes et tempos semblables) qui forment un ensemble complet, une sorte de poème symphonique auquel il n'y a plus rien à ajouter, ni scherzo, ni finale* mais peut-être simplement un titre.

* Il existe cependant des esquisses pour ces deux mouvements.
**On n'insistera jamais assez sur l'audace de l'orchestration de cette symphonie

Il existe une intégrale "complète" des symphonies de Schubert, en 6 CD chez Philips, interprétée par l'Academie of St Martin in the Fiels, dirigée par Neuville Marriner.

Je dis "complète" car, outre les symphonies 1 à 6 et 9 déjà bien connues, l'enregistrement propose la 7ème en mi majeur, la 8ème complétée par les scherzo et Finale, ainsi que la 10ème et autres mouvements de symphonie inachevées.

Je trouve, comme nous le suggère si justement Piero, que les mouvements manquants de l'Inachevée n'apportent rien de plus à cette symphonie qui, par les deux mouvements connus, se suffit largement à elle même.

La véritable découverte est cette 7ème symphonie qui se trouve être une "inachevée" d'un autre genre : en effet, les quatre mouvements sont complets, mais seules les 110 premières mesures sont orchestrées, soit l'introduction et le début de l'allegro. Le reste est "noté sans la moindre lacune jusqu'à la dernière note du finale, et ce non seulement pour les parties mélodiques mais souvent aussi pour les voix importantes au point de vue harmonique et rythmique" (1) Pour l'achèvement de la symphonie, il suffit donc de compléter le cadre fourni par Schubert en suivant ses indications sur les instruments (à noter que Schubert prévoit pour la première fois dans une symphonie l'utilisation de trois trombones).

Le premier mouvement se compose d'une introduction en mi mineur suivi d'un allegro en mi majeur. L'introduction est une sorte de marche où clarinettes et bassons se font particulièrement entendre. Suit l'allegro dont le premier thème est vif et joyeux, et le deuxième tendre et lyrique.

Le deuxième mouvement est un andante en la majeur de forme lied typiquement schubertien. D'après Brigitte Massin, cet andante entièrement réalisé par Schubert lui-même serait devenu une des pages les plus célèbres du compositeur, tant il est personnel et rempli de grâce avec ses passages d'un groupe d'instruments à un autre.

Le troisième mouvement est un scherzo en ut majeur avec, comme trio, un laendler en la majeur.

Le quatrième mouvement, finale, est un allegro giusto en mi majeur assez proche du premier mouvement.

Cette symphonie, quelle que soit son orchestrateur (Weingartner ou plus récemment Brian Newbould) est à mon avis un chef d'oeuvre au moins équivalent aux symphonies précédentes y compris la 6ème. Elle devrait être plus souvent interprétée et enregistrée.

(1) Weingartner, qui a réalisé une orchestration de la symphonie en 1934.
Lorsque l'on écoute les symphonies numéros 1 à 5, il paraît évident que Franz Schubert s'est inspiré de son illustre modèle. Par exemple, la Cinquième ressemble passablement à la numéro 90 du maître de Estheraza.
Parvenu à l'âge de 18 ans, le jeune compositeur décide d'évoluer avec son temps. Il en a aussi désormais les moyens: Cinq symphonies complètes à son actif, des ouvertures, une formation musicale. Il écrit alors sa Sixième, placée elle sous les auspices de Rossini, qui était en train de triompher à Vienne.

Les symphonies fragmentaires

Peu de temps après, il se met à rédiger l'opus D. 615. Une symphonie fragmentaire dont il nous reste les expositions des premier et dernier mouvement. Il s'agit de réductions pour piano, avec déjà des indications instrumentales. Schubert se cherche une voie propre. Il explore la possibilité de donner à tous ces thèmes un dénominateur mélodique commun. Le travail s'arrête, pour diverses raisons pas toujours très claires, mais peu de temps plus tard, il se met à nouveau à rédiger une symphonie, le D. 708A. La démarche se précise, Schubert commence à trouver sa voie. Les quatre mouvements sont esquissés (à nouveau en version pianistique avec indications orchestrales) jusqu'à la fin de l'exposition. Pour le troisième mouvement, les choses sont suffisamment avancées pour que l'on puisse proposer une reconstruction complète. Dans sa forme, ce morceau anticipe étrangement le Scherzo de la «Grande»., D. 944. Il sera réutilisé par les musicologues pour suppléer au manque de Scherzo de la Dixième. Mais là encore, Schubert s'arrête, comme s'il anticipait déjà le résultat final, et comme si ce résultat à venir n'était à ses yeux déjà pas assez abouti.

Une symphonie complète... mais à l'instrumentation... incomplète !

Toujours aussi tenace (et l'on comprend bien combien l'image d'un compositeur dilettante, surtout au niveau de la composition orchestrale est une légende à détruire !) le compositeur s'attelle, en 1821, à la rédaction de la symphonie D. 729, que beaucoup considèrent avec raison comme sa Septième. Les idées vont très vite, et le compositeur rédige directement la version instrumentale, ne notant que les voix principales. Le travail est mené à terme, mais l'instrumentation n'est pas complète.
Deux tentatives de réalisation orchestrale existent:
• La première de Felix Weingartner, un fameux chef de l'entre deux guerres. C'est un texte assez maladroit est boursouflé, qui en dit plus sur l'orchestrateur - et son époque à lui - que sur le compositeur ! Il en est reparu une version discographique chez Berlin Classics il y a quelques années. Le résultat est, au mieux d'un intérêt documentaire.

Franz SCHUBERT (1797-1828) 31bxLNchkJL._SL500_AA300_
Notons que sur ce CD se trouvent aussi réunies des orchestrations des opus D 608 et 708a, nées de la plume d'un chef est-allemand, Peter Gülke. Le résultat n'est pas toujours probant, tous les fragments n'ont pas été travaillés, mais ce travail pionner a ouvert la voie de façon décisive dans notre connaissance de l'univers symphonique schubertien. Ce que l'on trouve dans l'intégrale Marriner (Philips) est un travail bien plus fidèle, au style bien plus proche de l'univers du compositeur, signé du même orchestrateur que pour la Septième.

Franz SCHUBERT (1797-1828) 45348E

Signalons aussi que ces esquisses peuvent aussi être écoutées dans un CD réalisé par Charles Mackerras et le Scottish Chamber Orchestra (Hypérion).

Franz SCHUBERT (1797-1828) SymphMackerras
• Pour cette Septième il vaut mieux se référer au travail du musicologue anglais Brian Newbould, une réalisation exemplaire, irréprochable, bien dans l'esthétique du musicien viennois.
A part la version de Neville Marriner avec l'Academy of St Martin-in-the Fields (Philips), il faut citer celle de Gabriel Chmura avec l'Orchestre de la Radio de Berlin (Koch Schwann).

Franz SCHUBERT (1797-1828) L16813ir0c0

Le chef rend pleinement justice à cette splendide partition qui, si elle avait été terminée, aurait figuré parmi les compositions les plus appréciées du répertoire ! Marriner est plaisant, mais un peu rapide. Schubert, ce n'est pas le jeune Mendelssohn, et nous ne sommes plus à l'époque de l'influence de Joseph Haydn !

Et surgit la fameuse «inachevée» (?)

Puis, en 1822, Schubert se remet au travail pour sa symphonie qui deviendra la plus célèbre, la Huitième plus connue sous le nom de Symphonie inachevée (alors qu'il y en a plusieurs !)... Là encore, le musicien manifeste sa volonté d'aboutir dans le genre instrumental.

Nous y reviendrons !
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